Couvre-feu : les réacs attaquent

A la suite de villes aux maires bien réac comme Béziers, Perpignan, Nice, Cannes, Mulhouse, six communes de la Vienne ont décidé de décréter un couvre-feu de 22h à 5h pour « lutter contre la propagation du virus » : Buxerolles, Biard, Châtellerault, Fontaine-le-Comte, Poitiers et Saint-Benoît.
Alain Claeys, le maire de Poitiers, est le premier à demander son instauration par la préfecture. Selon lui, les mesures de confinement hyper restrictives qui interdisent de sortir sans attestation, ne le sont pas assez. « La situation n’est pas encore complètement satisfaisante et nous constatons un nombre important de verbalisations la nuit. Ainsi, hier soir [dimanche 22_mars], ce sont 40 verbalisations qui ont été effectuées par les services de police. Il est de notre devoir de prévenir le plus en amont possible les effets d’une vague épidémique afin d’assurer le meilleur fonctionnement de nos centres hospitaliers. Aussi, cette mesure s’impose dès aujourd’hui avec force. »
Voilà pour les mots. Et concrètement, qu’est-ce que cela change ? Rien puisqu’il est interdit de sortir sans attestation dérogatoire, sous peine d’une amende de 135€ en cas de contrôle par les flics, qui décident ou non de verbaliser selon que ces derniers jugent la raison valable ou pas. Comme la journée.
Le couvre-feu n’est pas une mesure sanitaire, mais une mesure sécuritaire et raciste qui relève d’abord de la communication. Il n’a jamais été appliqué dans des communes rurales, puisqu’il vise les quartiers dits populaires, en fait racisés. En regardant l’histoire, cela est clair. Le couvre-feu a été utilisé en France lors de la fin de la guerre d’Algérie, et c’est lors d’une manifestation contre le couvre-feu pour tous les « Français musulmans d’Algérie » qu’a eu lieu le massacre du 17 octobre 1961 à Paris. On se souvient de son utilisation lors des émeutes de 2005 dans les banlieues suite à la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré ou plus récemment à La Réunion au début du mouvement des Gilets jaunes.

Les media à la rescousse : racisme et paternalisme

Pour vendre cette mesure dégueulasse, les pouvoirs publics peuvent, comme d’habitude, compter sur les media locaux. On a lu et vu pas mal d’articles et de sujets pendant le confinement, parce qu’on avait du temps, et pour votre santé mentale, on ne vous conseille vraiment pas. On a choisi un reportage de France 3, du 25 mars.
Le sujet traite de la première nuit de couvre-feu à Poitiers en suivant la police. Il s’assimile à un reportage de guerre : nous sommes avec les keufs dans une « ville en guerre contre le virus ». Il y a deux camps : les gentil·les dont les flics qui lutte contre, et les méchant·es qui propagent le virus. Oui oui, la vie c’est super simple.
Les gentil·les sont dans le centre, les méchant·es dans les quartiers périphériques. Dans le centre, on voit des gens marcher dans la rue, tranquille. Et deux personnes sont interrogées, l’une d’accord avec le couvre-feu, l’autre qui va travailler, alors que les keufs sont pour l’instant absents. Et puis on va à Saint-Eloi, un « quartier connu pour ses trafics de drogue ». Un quartier de méchant·es, où les keufs se baladent avec des lampes torches. Jérôme, policier, s’adresse à deux personnes à leur fenêtre : « Faut plus sortir à cette heure. On est d’accord ? Oui ? C’est très bien ». Les méchant·es, faut leur parler comme à des chiens pour qu’iels comprennent. Il enchaîne, à la caméra : « Y’a tout l’temps, tout l’temps du monde. Ils sont présents, ils sont là encore, parce qu’ils sont partis par les parkings souterrains. » Les rats se cachent pour propager le virus, merci Jérôme de nous protéger, grâce à ta lampe torche ! On va ensuite à Beaulieu, où Jérôme ouvre des portes pour débusquer les rats. Il n’en trouve pas. Les gentils vont gagner la guerre.