Amazones

par les Chiennes Hi-Fi

On mettra sans dessus-dessous le confort de leur zone
La refaire à notre sauce
Paraît qu’on leur prend la tête
Faire la queue, les sucer dans des secondes zones
Le glas de ce monde klaxonne
Aujourd’hui on prend la tête
On mettra sans dessus-dessous le confort de leur zone
La refaire à notre sauce
Paraît qu’on est pas des bêtes
Si tu erres sur les terres des Amazones
Tu fais partie de la faune
Ici les rois perdent la tête

À la fin de mes concerts, des girls en masse viennent me dire que mon son défonçait
Que des gonzesses, cette exclusivité me déconcerte me retourne le veau-cer
Pourquoi ya que des go, merde ?
Est-ce que les mecs se concertent,
Sont pas concernés ?
Pourtant ils cernaient la zone lumineuse de devant la scène.
Mon cerveau vocifère : mais putain qu’est-ce qu’il faut faire
pour voir ma musique leur plaire ?
Parler de biz, de cannabis, ou simplement me faire pousser la bite ?
Toutes ces questions m’habitaient
Ces questions m’abîmaient
Pendant longtemps ça m’a minée
Maintenant c’est terminé.

Pourquoi j’aurais besoin de leur adhésion
J’ai déjà celle de mes reuss
On se passera de leur permission
pour mettre le feu en masse
aujourd’hui le rap intéressant
il est fait par des meufs
Prends de l’espace vas-y passe devant
on va faire de la place

Pourquoi j’aurais besoin de leur adhésion
J’ai déjà celle de mes reuss
Peu de chances de gagner leur admiration
pour autre chose que mes seufs
Si on peut pas faire avec, on fera sans
Épaisse est la cuirasse
On va leur mettre les oreilles en sang,
Honneur à notre race

Assez parlé d’eux, avec eux, par les temps qui courent
Mieux vaut taper dans le tas que parler ! On est parties pour
abolir les pourparlers,
la relève sur les remparts, pagnes léopards, griffes au nail-bar,
Bander de l’arc c’est girly
Élevées comme des chiennes en matière d’amitié, il nous reste tout à apprendre :
Mordre le maître pour retrouver la meute, et le mettre à l’amende.
Hystériques et déchainées, nique les thérapeutes, vive les garces,
plus de compassion quand le coup part,
les hommes viennent de Mars et les femmes de l’émeute

Il a souffert, c’est pour ça qu’il te cogne ?
Qu’il se paye un psychologue !
C’est offensant quand tu romps le dialogue ?
Qu’il se trouve un pédagogue !
Barbie a quitté le catalogue,
ils auront beau rire et se moquer,
leur ouroboros va se la gober tout seul sa grosse queue,
t’es déjà bookée.
Il t’a trahie ça fait mal, solidarité de mâle, que croyais-tu que tu valais ?
Un srab, un ami quand il t’appelait « ma couillasse, ma poto » ? mais t’étais qu’une go
Reste à ta place ou menace son égo.
On vivra d’amitié et d’eau, « bendo na bendo », tout ce qui coule dans nos gorges c’est du flow.

S’ils en réchappent c’est de justesse,
Nos flèches ne sont pas bénignes
Quand les violées se feront justice
Les juges seront en première ligne
Une femme c’est doux c’est facile
pourtant je suis pas si pacifiste
Mon geste ajuste sa cible
Passe pas dans le champ t’es passible
De figurer sur ma liste

Paraît qu’une femme c’est doux c’est fragile
Il paraît, il paraît
Paraît qu’une femme c’est doux c’est fragile
Il paraît, il paraît
Paraît qu’une femme c’est doux c’est fragile
Il paraît, il paraît
Paraît qu’on leur prend la tête !
On mettra sans dessus-dessous le confort de leur zone
La refaire à notre sauce
Paraît qu’on est pas des bêtes
Si tu erres sur les terres des Amazones
Tu fais partie de la faune
Ici les rois perdent la tête
Aujourd’hui j’en place une pour mes Amazones, pour mes jolies mômes pour mes zouz pour mes gonz’, pas pour mes amis hommes
Pour celles qui chialent dans la loose, pour celles qui déraisonnent
Tenez bon ensemble on cramera la camisole !

Contre l’amour

« L’amour est un dieu. On communie avec lui dans l’extase la plus complète. On l’attend au tournant, on l’appelle au secours, on rêve d’être touché-e par sa grâce, on craint ses courroux plus que tout. On l’adore. On le prie, le soir dans son lit, de se manifester. Il nous sauvera. »
« L’Amour, c’est une forme d’échange affectif totale. Totalisante. Totalitaire. L’Amour, c’est toutes les formes d’échanges affectifs réunies. Un monstre, un léviathan, une hydre à moultes têtes._»

Cinq textes courts pour abandonner l’Amour avec un grand A, l’Amour mièvre, romantique, exclusif, hétéronormé, codé, catégorisé, possessif… Et pour entamer la construction d’une affection abondante, sans dominations et sans dépendances. Petites analyses de la culture de l’Amour, idées pour s’en défaire progressivement.

Pour lire la brochure : infokiosques.net/spip.php?article158

Moudre l’amour

L’amour c’est quoi ? Un sentiment. Un sentiment qui lie des personnes entre elles. C’est aussi une norme. Parce qu’avec le mot amour, viennent rapidement en tête des images : deux personnes, l’exclusivité et la fidélité, la vie sexuelle, la vie commune, le PACS ou le mariage, le ou les enfants. Comme ça, d’instinct, sans plus y réfléchir. Une norme, c’est un état répandu, moyen, souvent considéré comme une règle à suivre. Une norme, c’est puissant et ça nous dépasse. Cette norme, elle nous oblige.
D’où elle vient ? De partout. Partout autour de nous. Notre famille, nos ami·es, les gens qu’on fréquente. La plupart des personnes autour de nous sont en couple ou cherchent à l’être. Dans la littérature, le cinéma, la peinture, le théâtre, la musique, à la télé, à la radio. Dans la plupart des fictions, des documentaires, des reportages, les personnages sont en couple ou cherchent à l’être.
Et même les personnes qui refusent cette norme font en fonction d’elle. Quand on ne veut pas d’exclusivité, on parle d’amour libre, quand on veut plus qu’une relation à deux, on parle de polyamour. Les mots qu’on utilise, et derrière eux les réalités qu’ils décrivent sont enfermées dans cette vision de l’amour. Parce qu’il faut constamment se définir par rapport à elle. Et ça tue nos imaginaires.
L’amour, cet amour-là, est donné comme la chose la plus désirable sur Terre. Comme le moyen le plus noble d’atteindre le bonheur. Alors que c’est l’un des outils de contrôle social le plus puissant qui existe. Il façonne nos vies, des vies toutes pareilles qui restent dans le cadre, sans déborder. Pour habiter ensemble, il faut louer ou acheter, et donc de l’argent, et donc travailler. Tout comme une fois les enfants né·es, pour les couches, les jouets et la bagnole. Et puis pour montrer son amour, il faut offrir des choses. Il faut faire des efforts pour l’autre, abandonner tout ou partie de ses envies, de ses désirs. Et ne pas prendre de risque, pour ne pas faire de torts à l’autre. Et à force de s’oublier, cet amour-là rend malheureux. Toujours.
Même si on cherche à ne pas être dans cette norme, à ne pas penser et se définir en fonction d’elle, le monde et les personnes qui nous entourent nous y forcent. Nous vivons dans un monde d’amour factice et subit. Qui restreint nos envies et la possibilité même de nos envies. Même consenti par toutes les personnes concernées, se sourire, se parler, se toucher, s’embrasser, se câliner, se caresser n’est pas dépendant des envies de chacun⋅e, mais des situations vis-à-vis de l’amour et du regard des autres. L’hypocrisie est alors généralisée : on ne fait pas ce qu’on désire, mais ce que la norme nous impose. Ou ce qu’on croit qu’elle nous impose.
Le problème n’est pas que deux personnes aient envie de passer du temps ensemble, de baiser seulement ensemble, et tout l’reste. Mais que ce soit la seule option envisagée et souvent envisageable dans cette société mortifère. Tellement que cela bloque nos imaginaires. Qu’on en reste à des formes assez proches de la norme même quand on souhaiterait péter tout ça. Qui aimer ? Comment aimer ? Il est important d’en parler, dans des groupes, à ses proches, à des inconnu⋅es de passage. Pour péter la norme. Nourrir collectivement nos imaginaires. Et faire évoluer les possibles.