Affinité et Organisation Informelle

Dès que l’on est plus qu’un, soi-même, il se pose la question d’avec qui je lutte, pourquoi et comment. Voilà quelques réflexions proposées dans ce 2e numéro des cahiers anarchistes internationalistes Hourriya, résumées ici (et copié sans scrupules) dans les grandes lignes.

L’organisation est un outil fonctionnel, c’est la coordination des efforts mentaux et physiques initiés par des individus pour atteindre un but ou réaliser quelque chose. Ici on ne parle pas d’organisation comme de structure au-dessus des individus, de forme à laquelle il faut adhérer (syndicat, parti, asso, drapeau…). Sans perspective personnelle claire, s’organiser devient une fin en soi, et il est courant que l’on se laisse porter par les envies des autres sans réfléchir à ses propres buts et motivations, ce qui revient à se laisser guider par des chef.fes même si iels n’en portent pas le nom.
Le regroupement affinitaire est une forme de mise en relation de personnes, basé sur des idées, méthodes, pratiques communes, envies, peurs, limites… L’affinité est mouvante et se crée pour certains projets et pas d’autres, avec certaines personnes, et pas d’autres. L’affinité ne se décrète pas, elle ne correspond pas à un contrat, ce n’est pas une bande de pote, ni un sentiment amoureux, ni un regroupement lié à un vécu d’oppression commune. L’organisation affinitaire favorise la qualité des liens et des échanges, est basée sur la confiance mutuelle ce qui prend du temps et de l’investissement. L’affinité est une recherche de la qualité et non de la quantité. Il n’y a pas de recherche de croissance au groupe affinitaire, ce qui nécessairement ferait rogner sur des idées ou des pratiques pour correspondre au plus grand nombre.

Dans certaines situations il est nécessaire que des groupes affinitaires se coordonnent pour un but défini et partagé. Cela en laissant une liberté de mouvement et de l’autonomie aux petits groupes, pour ne pas tomber dans la synthèse, dont le seul objectif est celui de composer, pour faire naître un ensemble dont on finirait par dépendre. La supériorité de cet ensemble sacrifie l’unicité individuelle pour avancer sur une route à sens unique pour toustes. Ces rassemblements de groupes affinitaires sont éphémères et n’ont pour durée que celle du but collectif à atteindre ou bien quand on estime qu’il n’est plus possible ou adéquat de chercher à l’atteindre. Dans ce cas, on parle d’organisation informelle. « Organisation, parce qu’il s’agit d’une coordination des volontés, des moyens et des capacités entre différents groupes affinitaires et individualités qui partagent un projet spécifique, limité dans le temps. Informelle, parce qu’il ne s’agit pas de promouvoir un nom quelconque, de renforcer quantitativement l’organisation, d’y adhérer formellement ou de souscrire à quelques programmes ou déclarations de principe, mais d’une coordination agile et légère pour répondre aux besoins du projet de lutte. ».

« S’auto-organiser, donc – en s’opposant à l’inversion contemporaine entre les moyens et les fins, qui a fait du moyen sa propre fin. La fin doit déjà être contenue dans le moyen, le moyen doit déjà être contenu dans la fin. Pour se désaltérer, il faut remonter à la source, et le parcours est déjà rafraîchissant en soi. Voilà la raison de l’organisation informelle. Le monde auquel nous aspirons ne peut être un continent régi par une seule loi, fut-elle celle de la justice sociale décrétée à l’unanimité, mais est plutôt un archipel aux mille expérimentations. Si nous ne voulons pas vivoter pour trouver une solution progressive au faux problème de quelle civilisation choisir, alors il nous faudra reconnaître qu’on ne peut trouver la liberté que dans la jungle obscure, dont l’exploration se fait à nos risques et périls, de jour comme de nuit, avec des marches et des pauses, le long des sentiers déjà battus et de maquis à travers lesquels s’ouvrir un passage. Une exploration qui a besoin de compagnons de voyage, d’instruments et de connaissances.
Qui n’a pas besoin de programmes, mais d’attention et d’idées claires. »

La police du futur

La police du futur, le marché de la violence et de ce qui lui résiste. Mathieu Rigouste
version longue 2022 en bouquin / version 2018 en article dans la revue le crieur

Si vous aimez les films d’angoisse futuriste, ce texte est pour vous ! On survol les nouvelles créations techno-policières en service ou en projet, sans rentrer non plus trop dans les détails très précis ou technique. En allant voir ce qui se trame au salon Milipol, grand rdv des boîtes d’armement et de sécurité on peut avoir un bon aperçu des tendances.
Une prolifération des armes dites non létale ou sublétale, qui ne viennent en rien remplacer les armes existantes ou réduire le nombre de mort par la police, mais viennent juste étendre le champ d’action, augmentent le degré de violence au quotidien et engendre de plus en plus de mutilation.
« la police du futur, c’est un peu comme l’armée du futur, c’est une police connectée » déclarait le ministre de l’intérieur en 2017. Flic connecté, camera connecté, drone connecté… On voit bien les liens entre flicage et télécom-
munication qui permettent d’aller toujours plus vite dans la transmission et la collecte de donnée, notamment avec la 5G.
La tendance actuelle c’est aussi la robotisation des moyens de contrôle et la recherche d’un policier « augmenté ».
Et pour encore plus de sérénité pourquoi ne pas instaurer le contrôle permanent et l’auto-surveillance des populations. Un flicage autogéré ! Cela passe par le concept de « safe ciy », des espaces en permanence vidéosurveillés où des algorithmes prédisent et/ou repèrent les situations où les personnes « à risques ». Lea bon·ne cityoen·ne vigilant·e est mis·e à contribution et encouragé·es à balancer ces voisin·es grâce à des applications participatives.
Ces évolutions technologiques ne sortent pas de nulle part, elles sont directement le fruit d’un business en constante augmentation. Comme n’importe quel produit (bon quand même là ça nous impacte plus que la nouvelle boite de chocapic) la sécurité et l’armement sont là pour faire du fric. L’économie et l’armement/sécurité, les entreprises privées et les institutions sont dans une étroite collaboration, les unes pour faire du fric, les autres pour la réalisation d’une croyance en un monde techo-sécuritaire.
Les keufs alimentent clairement le marché de l’armement en conseillant les entreprises et les entreprises incitent à la consommation et créent des besoins de toute pièce, en proposant des produits technologico-policier soit disant toujours plus performant. Les boîtes ne sont pas là pour répondre à des besoins (disons plutôt des envies), aussi nuls soit ils, elles sont là pour créer ces besoins. Les institutions achètent pour réaliser leurs mythes mais aussi dans des logiques de copinages de classe, filer de la thune à ses potes c’est chouette.
Il n’y aurait peut être pas de suréquipement technologique de la police si il n’y avait pas d’entreprise pour les inventer et les réaliser. Le livre file cite pas mal d’entreprises responsables de cela : IDEMIA, IBM, Thalès, Engie Ineo, Atos, Huawei, Verney-Carron, TBC-France…

Lectures revanchardes

• Les orageuses / Marcia Burnier / ed. Cambourakis

C’est un petit bouquin, qui fait autant du bien qu’il tape là où ça fait mal, au cœur de l’hétérocispatriarcat. Sans trop être enrobé de fioritures, voir presque pas assez (on aimerait parfois en savoir un peu plus sur les personnages), on suit des bribes de vies reliées par une même envie. Une envie de vengeance, de violence collective par celleux qui se sont fait marcher dessus. Ça ne parle que de cela, un peu des dérives, des doutes aussi. Et ça fait du bien dans une fiction, d’avoir ce point de vue, celui des survivant.es amoché.es mais pas victimisé.es, et cette perspective, celle qui nous redonne la force et la capacité d’agir surtout quand on est épaulé.es.

Toute rage dehors/ infokiosque.net

Tu trouveras une compil de textes mettant en mots des actes de ripostes et de vengeances concrètes. Des mots de colère, de frustration mais aussi de joie et de plaisir. Ça va du récit d’expérience perso au communiqué d’action collective. Pour donner des idées, des envies, des moyens d’agir contre celleux qui perpétuent et profitent de la domination sexiste. Mais aussi pour nous questionner dans notre propre rapport au conflit, à la violence et faire notre chemin perso là dedans sans suivre une voie toute tracée.

Hourriya n°6 : La guerre du sous-sol

Hourriya, c’est une série de petits livres format A6 qui explorent des sujets spécifiques dans une optique anarchiste internationaliste. Ce numéro et les précédents peuvent être commandés sur hourriya.noblogs.org. Dans le numéro 6, La guerre du sous-sol, paru à l’été 2020, les auteurices évoquent la question des matières premières à travers cinq articles.

On a bien apprécié les deux premiers articles. Le premier offre un balayage assez complet de 200 ans d’industrialisation, des plantations coloniales de caoutchouc à l’extraction des terres rares en passant par les puits de pétrole. Un bref récit pour nous rappeler que « La terre entière est devenu un immense gisement à piller pour fabriquer et alimenter des machines. Aucune solution de continuité ne nous sortira de l’abîme, aucune “résilience” n’est possible sur une planète ravagée par les pillages, empoisonnée par les déchets et traversée par des guerres pour le contrôle des matières premières. Seul un bouleversement profond de l’existant pourrait amener une perspective autre. »
Le second, nous entraîne de manière pointue (peut-être trop) dans le domaine assez méconnu des réseaux de la vente de matières premières. Sont ainsi citées des noms d’entreprise que l’on connaît bien peu (Vittol, Gunvor, Trafigura, Koch, Louis Dreyfus…) et qui pourtant brassent des centaines de milliards et sont un rouage central de l’industrie mondiale.

Le propos clair et accessible permet d’avoir un aperçu d’ensemble des ravages passés et actuels ainsi que des mécanismes qui produisent cette désolation. Même si on regrette que le livre n’aborde pas les moyens concrets pour réaliser ces rêves de destructions.

Les deux articles suivant, centrés sur l’amérique du sud, nous ont semblés moins pertinents pour alimenter les réflexions et pratiques locales. Le livre termine par une réflexion générale sur les luttes de territoire et sur comment « Au-delà du simple slogan, remettre en cause le monde (autoritaire, capitaliste, industriel, technologique) qui en a besoin et produit les structures mortifères qui se construisent partout, peut s’adresser à toutes celles et ceux qui, tout en ne subissant pas nécessairement les impacts directs de quelques nouveau “grand projet”, n’en font pas moins quotidiennement les frais des aberrations du Progrès ».

Inceste

Cette brochure est une compilation de divers contributions sur le sujet de l’inceste par des personnes qui l’ont subis. Sa lecture n’est pas facile parce que les violences sexuelles sur les enfants restent un tabou mais aussi parce que les faits décrits sont violents et peuvent faire écho à des situations personelles. Comme le disent les auteurices : « – on a envie de se faire du bien à balancer nos vécus, ça permet de prendre du recul sur ce qu’on a vécu. Aussi peut-être pour que nos proches sachent… – on a envie que des gens puissent s’y reconnaître à des endroits et que ça fasse écho pour aider à nommer les situations (ça va plus vite de réaliser des trucs quand d’autres gens posent des mots sur des histoires dans lesquelles on se reconnaît). Ca fait un début de reconnaissance aussi, de capter que des personnes trouvent problématique une situation similaire à la tienne. […] – on veut que les potes qui ont vécu de l’inceste se sentent moins seul.e.s […] « […] quand même, on s’apprête à défoncer le tabou. A trahir les personnes qui sont censées nous avoir aimées et protégées et qu’on doit apprendre à pardonner (et blablabla morales de merde). C’est dur de parler. Et puis parfois théoriquement on sait ce qu’il s’est passé mais émotionnellement on n’en est pas encore à se faire confiance. On banalise, on minimise, on justifie, on tente d’oublier. Et puis parfois, on sait, quelque part au fond de nous, mais notre mémoire nous refuse les souvenirs. C’est dur de parler. Plusieurs personnes nous ont dit qu’elles ne se sentaient pas légitimes à écrire, malgré leurs vécus incestueux. Parce que c’est de l’inceste oui, mais « pas très grave ». Et la peur aussi qu’on a quasi tou.tes à l’idée qu’un membre de notre famille tombe un jour sur cette brochure et s’y reconnaisse. C’est dur de parler. Alors aujourd’hui, nous sommes fières de cette brochure et de réussir à parler. (Trop badasses :) »

A retrouver sur infokiosques.net

Contre toutes les cages

Quand on commence à parler de lutte conte la prison d’un point de vu féministe, on peut avoir dans la minute une remarque du genre « mais les violeurs* quand même ! ». Alors trigger ce texte va parler de ça un peu (pas de détail, pas de description) mais c’est surtout une tentative de réflexion anarca-féministe plus générale.

pourquoi parler de ça

Les luttes féministes contre la taule ne s’arrêtent pas à la question des violeurs, heureusement. Seulement dans les critiques anti-carcérales il y a parfois un vide à ce sujet. Est-ce délibéré ? Trop épineux ? Casse-gueule ? Essayons de se frotter aux ronces. La proportion pour viol ou agression sexuelle en taule est relativement faible (10,7 %, source OIP) alors certain·e ne trouve peut-être pas judicieux de s’attarder dessus. Plus de la moitié des prisons sont remplis par des peines pour vols ou trafic de stup (source OIP). A ces sujets la critique de l’enfermement est plus “simple”, il suffit de dire que ces personnes pourraient être libres si on changeait notre relation à la propriété et à la légalité (de la défonce notamment). Un braquage, un acte quelconque de rébellion contre la société, peut être vu comme une chouette pratique subversive. Cependant, être en taule pour viol, pédocriminalité, inceste… c’est pas mythifiable, c’est pas excusable et donc on fait quoi avec ça.

la société du viol

Les violences sexuelles et sexistes font partie du patriarcat, elles ne sont pas des faits isolés ou le résultat de comportements individuels « déviants ». Elles sont la norme. Le produit d’individus bercés dans une société qui diffuse la culture du viol. On peut juste vous dire de regarder, écouter autour de vous, de réfléchir 5 minutes à vos comportements ou vécus. Ce n’est pas parce que les personnes autrices sont le produit d’une société sexiste, qu’elles ne sont pas responsables de leurs actes, elles le sont. Reconnaître qu’on merde, qu’on a merdé c’est possible, changer c’est possible. Les personnes qui acceptent de jouer ce rôle, qui choisissent de ne pas s’en extraire, qui profitent de leurs privilèges, ces personnes sont complices de ne rien faire pour changer elles-mêmes et leurs comportements et pour ça, ce sont des merdes. Seulement, on peut aussi considérer que la merde est partout, autour de nous et aussi en nous toustes. Penser que la prison pour les violeurs est un remède miracle n’a pas de sens. Penser que la prison tout court est un remède à quoi que ce soit n’a pas de sens. Penser qu’il existe un remède miracle contre les violeurs n’a pas plus de sens.

problème dans le système

La police, la justice, la prison ne sont pas là pour vous « protéger » car ces institutions sont les rouages d’un état patriarcal qui protège les auteurs et perpétue ces violences à l’intérieur même de ses institutions. Demander des droits, c’est demander à l’état patriarcal de s’en porter garant, c’est demander à la source même des oppressions d’y mettre fin. La culture du viol imprègne les flics, les juges, les avocat·es, les procureur·es, les magistrat·es, iels appliquent leurs représentations sexistes et raciste sur les concerné·es et parmi elleux il y a aussi des agresseureuses qui soutiennent et protègent les autres. Qui font les lois ? Des hommes cis, hétéronormés, blancs et riches. Qui remplissent les taules ? Toustes les autres… Les non-blanc·hes, les pauvres, les pas normé·es, les trans… Penser la taule comme une option possible, c’est oublier les biais de ce système et fermer les yeux sur ce qu’il perpétue. Bien qu’avoir recours au pénal, porter plainte, pour certaine est une question de survie à un moment donné, cela ne reste pas une solution en soit, c’est un palliatif. Le problème est systémique. Lutter contre le patriarcat ne se cantonne pas à une tentative de changer des comportements, c’est lutter aussi pour la destruction de tout un système oppressif, pénal et étatique.

les agressions ne s’arrêtent pas aux portes des taules

Les biais patriarcaux sont présents en prison comme partout ailleurs, la prison n’est que le reflet de la société. Les prisonier·es ne sont pas des héro·ines exemptes de comportement de merde. La prison n’exclut pas le sexisme, la lesbophobie, la transphobie, l’homophobie… Au sein même de la taule il y a des viols et des agressions. Les personnes homo et les trans en sont très souvent victimes. Pour tenter d’éviter ça iels se retrouvent contraint·es d’être placé·es à l’isolement, c’est à dire en cellule individuelle, sans aucun contact avec les autres prisonier·es et le moindre mouvement encadré par des matons. Iels subissent donc une double peine. Autre exemple, les violeurs condamnés, appelés « pointeurs », se font souvent défoncer, par les autres détenus ou par les matons. La taule c’est comme la société, une vaste hypocrisie, ça condamne le viol par le viol. Quand un mec cis défonce un violeur en taule, il défonce un violeur “reconnu”, il frappe ce que la société à travers sa police, ses tribunaux et ses taules reconnaît comme un violeur. Par sa violence, il renforce la séparation symbolique entre lui et le violeur. L’usage de la violence lui permet bien souvent d’éviter de réfléchir sur ses propres comportements et de continuer de se voiler la face. Cette violence là, qui consiste à s’acharner sur le bouc émissaire du viol n’a rien à voir avec celle menée par les survivant·es contre leurs bourreaux. La prison de part sa violence permanente, encourage et perpétue la violence viriliste.

Alors franchement, si on pense encore une minute que la taule est une solution pour régler son compte au patriarcat, on se fout un barreau dans l’œil.

pour qu’on se tienne sages

Les viols ne se sont pas magiquement arrêtés depuis qu’ils sont criminalisés, ce qui remonte à 1810 quand même. La soi-disant menace de la prison ne sert donc à rien. La prison n’a aucune incidence sur la culture du viol, voir pire, elle entretient une image fantasmée du monstre alors que la plupart des agressions ont lieu dans le cercle familial ou par des personnes connues de lea survivant·e. Elle nous maintient dans une peur stéréotypée, pourtant les agressions sexistes sont perpétués par tout le monde, dans des milieux populaire, chez les bourgeois, chez les anar… Cette peur sert aussi à nous maintenir dans un statut de victime incapable d’agir, de réagir. Cela nous dépossède de tout droit de réponse, de toute recherche de solution par nous même et pour nous même. On parle souvent de la violence de l’état et de la nécessité à utiliser cette même violence contre celui-ci et ses représentant·e. Ne sommes-nous pas là aussi, face aux violences sexistes structurelles, dans la nécéssité d’utiliser cette même violence pour en combattre ses représentant·e ? C’est à chacun·e de savoir et choisir ou placer ses curseurs de vengeance, de pardon, de réparation, d’acceptation et de survie.

une prison genrée

Tout le système pénal entretient des normes de genre qui enferment doublement, physiquement et symboliquement dans des rôles stéréotypés. La prison participe activement à te faire rentrer dans la norme, soit un mec viril ou soit une meuf docile. La prison t’enferme dans un genre, le genre t’enferme dans une prison. La face cachée de la prison dans une société hétéronormé et sexiste, ce sont les femmes, les mères, les copines, qui payent les conséquences de l’enfermement même dehors. Ce sont elles qui se tapent comme toujours le travail invisible du soin (laver le linge, écrire, soutenir…) et la gestion des gosses s’il y en a. Alors si on veut dire merde à tout ça, faut dire merde aux prisons.

ce monde est une prison

S’opposer à la prison ce n’est pas juste se battre contre des barreaux de fer qui entraveraient des libertés. Les barreaux, tu les as autours de toi, tu les sens dans ta chair, tu les vois dans ta tête, tout le temps. Ce sont toutes les injonctions au genre que tu te prends sur la tronche, toutes les oppressions que tu subies, toutes ces libertés qui n’existent pas pour toi. Ce sont aussi ces barreaux du quotidien qu’il faut faire sauter pour tendre vers la liberté. *si les personnes autrices de violences sexuelles sont mises au masculin, cela ne veux pas dire que les violeuses, agresseuses n’existent pas, seulement qu’en proportion cela représente une moindre proportion.


Pour aller plus loin

Pourquoi faudrait-il punir ?, Catherine Baker, éditions Tahin Party, 2004

Pour elles toutes, Gwenola Ricordeau, Lux Éditeur, 2019

Femme trans en prison, juin 2011 , disponible aussi sur infokiosques.net

Emissions de radio féministe/queer sur la prison sur radiorageuses. net

 

Nihilisme de genre : un anti-manifeste

https://breakdown.noblogs.org

Cette brochure propose un point de vue plutôt rare et méconnue sur les questions de genre et d’identité. Si certains points peuvent paraître complexe et nécessiteront d’aller chercher des termes de vocabulaires, nous pensons que le propos en vaut largement la peine. Un propos clair et cohérent qui réussit très bien à expliquer des termes et des concepts pas forcément évident. Bref une brochure qu’on ne peut que conseiller.
« Le soi, le sujet est un produit du pouvoir. Le « Je » dans « Je suis un homme » ou « Je suis une femme » n’est pas un « Je »qui transcende ces déclarations. Ces déclarations ne révèlent pas une vérité sur le « Je », mais elles constituent plutôt le« Je ». Homme et Femme n’existent pas comme étiquettes pour certaines catégories métaphysiques ou essentielles d’être, se sont plutôt des symboles discursifs, sociaux et linguistiques qui sont historiquement contingents. Ils évoluent et changent à travers le temps ; leurs implications ont toujours été déterminés par le pouvoir.»

« Cela ne signifie cependant pas que celleux qui s’identifient comme trans, queer, ou non­binaires sont coupables de la(re)production du genre. C’est l’erreur que commet l’approche féministe radicale traditionnelle. Nous rejetons de telles affirmations, car elles ne font qu’attaquer celleux les plus blesser par le genre.Même si la déviation du genre est toujours assimilée et neutralisée, elle est pour sur toujours puni. Le corps queer, trans, non­binaire est toujours le lieu de graves violences. »

« Pour elles [les féministes radicales révolutionnaires], nous devons abolir le genre de sorte que le sexe (les caractéristiques physiques du corps) puisse être une base matérielle stable à partir duquel nous pourrions être regroupé. Nous rejetons tout cela allégrement. Le sexe lui­même est enraciné dans les groupements discursifs, ayant été donné autorité par la médecine, et violemment imposé sur les corps des individu­e­s intersexes. Nous décrions cette violence. »

Tumer Fue

Quelle idée pourrie que de prendre en charge l’écriture de cet article alors que je fume. Ca a surement bien fait marrer les autres du torchon qui elleux n’y touche pas. Merci bien. Me voila à lire cette brochure avec un double poids sur les épaules : résumer 80 pages en XXX signes et arrêter de fumer sinon ça prouvera juste que cette brochure est merdique. Me voila à commencer la lecture, on me dit bien de continuer à fumer jusqu’a la fin du texte, je m’exécute, et continu de m’enfiler mes petites clopes par-ci par-là. Parce que je fais partie de cette catégorie de fumeur.euses-qui-fume-pas-trop-que-quand-ielle-le-veux-qui-arrete-quand-ielles-le-veulent-evidement. Dès le départ on me dit que c’est nulle comme conception, la dépendance est déjà là et ce sera même pire que les « vrai » fumeureuse pour arrêter. Chouette, j’ai hâte.

La brochure est la réécriture « militante » d’un bouquin, donc au moins c’est inclusif, épargné de croyances mystiques ou de sauce « développement personnelle ».
La méthode se base sur quelques trucs simples :
Se dire que c’est facile et être sûre que ça va marcher !
Etre heureux.ses d’arrêter !
Ne jamais reprendre !
La dépendance à la nicotine est un des sevrages des plus simple, trois semaines max pour ne plus sentir un effet de manque et des effets physiquement infimes (un peu la sensation du ventre vide). Le plus tenace c’est la dépendance psychologique. Et oui le tabac c’est surtout un conditionnement mental.

La brochure parle surtout de pourquoi tu as besoin de fumer et comment on est conditionné. Sans tomber dans le « si je ne fume plus, je serais trop sain.e, vive les salsifis et la salle de sport tous les jours », ça te démontre comment la clope te vend un plaisir coupable.
Qu’on te fous bien dans le crâne des choses complètements fausses que tout le monde a totalement assimilé : la clope détend (heu non c’est un excitant, ce qui te détend c’est d’assouvir ton besoin de nicotine), la clope rend magique les moments chouettes du quotidien (ya aucun effet euphorisant dans la clope, c’est dans ta tête et qui a déjà eu un orgasme en clopant ? ), la clope ça te plaît en goût (heu nan ça te flingue tes papilles ; et fanchement ta première clope elle avait quel goût ? )…
Fumer va avec son lot d’images publicitaires qui te vendent du rêve plus ou moins subversif, le mythe de la liberté et la sensation de braver les interdits (quel.le fumeureuse ne sent pas sa liberté de cloper entravée quand on lui dit que c’est non fumeureuse), une image de mec virile ou de meuf indépendante/sexy (génial c’est des rôles qu’on adore). Fumer c’est un conditionnement social, on croit avoir besoin de ça pour appartenir à un groupe, pour avoir l’impression d’exister… En gros en fumant on construit une histoire, sa petite histoire pour continuer.

Une fois que tu sais que tout ça c’est dans ta tête et que tu ne l’as pas choisi, moi ça me donne juste envie de dire merde. On en reparle la prochaine fois.

Un des facteurs de reprise, c’est tes clopes à toi, à vous mes copaines fumeureuses, à cette ambiance la clope c’est cool, à nos réu aquarium, aux pauses que seule toi va prendre, aux lieux amis qui éloigent la question… Pt’être que tu penses que c’est mon choix de vouloir arrêter de fumer mais nan t’es aussi concerné, alors est-ce qu’on peut commencer à en causer collectivement et à être écouté aussi. cimer.

https://infokiosques.net/spip.php?article1749

Autour des violences sexuelles

Le texte et les brochures qui suivent parlent de sexualités et d’agression. Ce sont des sujets qui remuent, donc faites attention à vous avant.

Le système patriarcal ce n’est pas seulement des individus de pouvoir et des institutions qui perpétuent la domination masculine, c’est un véritable poison qui vient pourrir jusqu’à nos interactions quotidiennes. Lutter contre les violences sexuelles, c’est aussi bien déconstruire toutes ces pressions qui nous font accepter et tolérer l’inacceptable qu’apprendre à régler nos comptes. La culture du viol n’est pas le privilège de quelques ordures mais une culture dans laquelle nous baignons toustes. Il faut détruire un ensemble de mentalité, d’institution et d’individu qui l’entretiennent et en tirent profit.

Une étape indispensable est de comprendre les jeux de pouvoirs et de manipulations au sein de nos relations. Démasquer les pressions que l’on se met nous-mêmes, révéler les manipulations et violences qui conduisent à ce qu’une relation désirée entre des personnes ne se transforme pas en un asservissement aux désirs d’une seule ou à ceux que nous impose la société. Il s’agit aussi de détruir les représentations de la sexualité véhiculées autour de nous et de les remplacer par ce que nous désirons.
Pour continuer cette réflexion, nous vous conseillons les articles du blog antisexisme.net sur les « interactions sexuelles à coercition graduelle »

Entre les interactions librement consenties et celles qui sont qualifiées de violences sexuelles, il existe toute une gamme d’interactions qui dépassent nos limites à des degrés divers. Ces dépassements ne sont pas forcément considérés comme des violences, que ce soit par la personne qui les dépassent ou la personne dont les limites sont dépassée. Cela est liée au fait que nos représentations des violences sexuelles sont si dramatiques qu’elles conduisent à dissimuler un nombre d’actions qui nous posent probleme à divers degrés. Nous nous retrouvons privé.es de terme pour définir de manière appropriée ce que nous avons vécu.es.
C’est ce sujet qu’approfondis la brochure Nous sommes touTEs des survivanTEs, nous sommes touTEs des agresseurSE.

Mais une fois que nous avons identifié un comportement problématique, réussi à mettre des mots sur nos expériences et nos ressenties, que faire ? Surtout comment faire lorsque l’on refuse de participer au jeux des tribunaux et de l’Etat ? Pas une réponse unique mais une multitude de possibilités, de propositions qui peuvent se succéder comme se combiner. Cela peut aussi bien passer par des processus de responsabilisation et transformation des personnes qui ont blessés, que par l’exclusion ou autres. Cela peut aussi être une remise en question des comportements et normes sociales qui servent de terreau à ces agressions (par exemple certaines manifestations de la culture du viol ou des éléments de la culture de l’intoxication), la mise en place de groupes en non-mixité… Mais aussi en élargissant la question aux réflexions concernant la gestion des conflits de manière plus générale.
C’est sur cet ensemble de perspectives que des compas nord-américain livrent un retour critique dans Accounting for ourselves. En quelques pages sont évoquées les limites de ces méthodes ainsi que des idées pour les dépasser.

Parce que sur le sujet des violences sexuelles, un des éléments importants est d’aider aux bien-être des personnes concernées, nous ne pouvons que très fortement vous conseiller la lecture de la brochure Soutenir un-e survivant-e d’agression sexuelle.

Contre l’école

En ce mois de septembre, nous avons décidé de vous présenter deux brochures critiquant de manière radicale les bagnes scolaires et le monde auxquels ils préparent. À un moment où les discussions autour de l’éducation semblent se limiter à dénoncer la privatisation, il nous paraît important de proposer une critique plus profonde de ce qu’est l’école.

En quelques pages et quelques histoires, ces brochures brossent un panorama des reproches que l’on peut faire à l’école mais ouvre aussi des pistes vers d’autres possibilités, d’autres chemins.

Brûle ton école
Des petits contes pour brûler son école.
« Puis un animal fier de lui-même, appelé homo-sapiens tomba d’un arbre et déclara un jour :« ça y est je sais tout ! et je le sais mieux que tout le monde ! »
Et il se nomma lui même « Grand Maître d’Ecole »
Il découpa toute sa science en petit morceau et se mit à faire la leçon en distribuant de ces petits morceaux de savoir à qui voulait l’entendre.
Or, il se trouva que personne ne voulait l’entendre. »

On voudrait nous apprendre à marcher en nous coupant les pieds

« Ce monde, c’est de la merde. C’est pas la première ni la dernière fois qu’on le dira. A bas l’Etat, le travail, le citoyennisme, le spectacle, l’abrutissement de masse, la vigilisation des espaces et des esprits, l’uniformisation de tout, des comportements, des relations, les enfermements, la généralisation des moyens de contrôle, de surveillance, de répression (etc., etc.). Si on en est là, c’est qu’existe, parmi tant d’autres horreurs étatiques, l’ECOLE, l’éducation nationale, l’institution scolaire. L’école, avec la famille, le ciment de notre meilleur des mondes. »