Dit vagues actions

Samedi, après avoir bloqué quelques instants la course de la lune autour de la terre, une horde de licornes s’est lancée à l’assaut du commissariat central de Poitiers. Après l’avoir ravagé à coups de paillettes, elles ont envahi la mairie pour y discuter de la destruction du capital et de la coloration des murs de la ville.

 

Jour de manif à Poitiers. Après trois heures à s’époumoner contre le capitalisme et son monde patriarcal, des milliers de personnes convergent vers un hôtel particulier du centre. Plusieurs pieds-de-biche passent de main en main jusqu’à ce que la porte craque. A l’intérieur, 300m² d’espaces à investir, qui viennent combler l’absence de lieu d’organisation de la ville.

 

 

Autodéfense : faire face à la police et à la justice

Au vue du climat actuel qui s’échauffe, quelques docs pour se défendre.

Face à la police / Face à la justice, Guide d’autodéfense juridique (2016)
infokiosques.net/spip.php?article538
Face à la police/Face à la justice propose une vue d’ensemble en 190 pages des procédures pénales courantes. Enquêtes, perquisitions, fouilles, contrôles d’identité, garde-à-vue, “plaider coupable”, prélèvement ADN, procès, peines, fichiers, droit pénal des mineurs : tous ces sujets, et d’autres, sont évoqués dans les différents chapitres. La machine répressive doit agir au nom du droit : connaître celui-ci, c’est apprendre la langue de son ennemi, c’est décrypter son idéologie pour pouvoir se repérer dans les méandres de ses dispositifs de répression. Il devient parfois possible d’échapper aux pièges les plus grossiers et d’user de tous les moyens, même légaux, pour s’en sortir au mieux.

Manuel de survie en garde à vue (2010)
infokiosques.net/spip.php?article1582
On aura beau décrire comment marche la GAV, dans la loi ou dans les faits, on passera toujours à côté d’un point essentiel : comment s’en sortir au mieux, sans aggraver son cas. Il faut avoir bien en tête qu’en GAV on cherche à tout prix à faire parler, à obtenir des aveux. Il importe donc de savoir comment on s’y prend du côté des flics, où est la part de bluff, et où on court un risque en mettant des bâtons dans les rouages de la machine judiciaire (notamment en refusant le fichage). Nous présenterons donc la GAV dans cette perspective : ne pas parler. S’il est nécessaire de s’y tenir, c’est parce que les tribunaux n’ont alors personne à envoyer en prison. Pas de preuves, pas d’aveux, pas de PV : pas de coupable.

Guide du manifestant arrêté (2019)
syndicat-magistrature.org/Le-Guide-du-manifestant-arrete-mis-a-jour-2019-1023
Pour tout savoir sur vos droits si vous êtes : contrôlé·e, arrêté·e, accusé·e, jugé·e en comparution immédiate, fiché·e. Par le syndicat de la magistrature : très jargonneux, mais à jour des dernières lois répressives de 2019.

Des vagues et du sel

En dessous, s’étend la mer. Une nappe bleue, étale. Un grand bleu parcouru de quelques tressaillements. Un piano sans accord, au repos.

Et là-dessus, y a un petit rien, une tâche d’huile qui glisse sur la surface. Un navire, presque une barque. Les autres sont déjà là, multitude de cris et de plumes. Au milieu de ce vide, ce bateau, c’est un monde à lui. Un récif de métal sur lequel serait venue se greffer la vie, ça bouge, ça harangue, ça se débat, ça se verse en bloc sur le pont à l’ouverture des filets.

Alors je pique, on pique, on vole. Par faim, par gourmandise, par jeu, par envie, par plaisir. Alors nous aussi on se bat sur ce festin providentiel. Parce qu’on pense n’en avoir jamais assez, alors qu’il y en a toujours trop. Parce qu’on ne veut pas être de ceux qui en aurait eu moins ou même voulus moins. Jusqu’à ce qu’il n’en reste plus une miette.

Puis il reviendra, ses cales remplies des trésors pillés à l’océan, et nous aussi, nuées ailées l’accompagnant dans sa migration pendulaire. Et les jours qui s’égrainent, qui deviennent des saisons, jusqu’à ce qu’il n’en reste rien. Jusqu’à ce que le filet ne ramène que de l’eau.

Alors il y aura des cris, de la rage et des pleurs, des vagues et du sel, sur l’eau comme au ciel. Mais ce sera trop tard, le temple est vide. Ils pensaient y puiser éternellement de quoi vivre, y trouver le sens et la substance. Ils y ont apporté la mort et la désolation.

Ils iront demander leurs dieux. Ceux que l’on prie dans les églises de pierres, que l’on implore dans les ministères, que l’on conjure au fond de son verre. Mais toutes les prières sont vaines, tous les rituels inutiles. Il ne leur restera que des souvenirs du moment où en-dessous s’étendait la mer. Une nappe bleue sur laquelle on dressait la table.

Sorg

Ni or ni maître, Montagne d’or et consorts

6 830 km. C’est la distance qui sépare Poitiers de Cayenne, chef lieu du département de Guyane. 6 830 km, c’est 310 fois Poitiers-Vivonne, alors pourquoi parler ici de la ville du mythique bagne plutôt que de celui de la Vienne ?

C’est que là-bas, dans la forêt se trouve une montagne, une montagne d’or qui fait frémir tous les conquistadors du XXIe siècle. Alors dans les bureaux, les avides préparent la conquête de la forêt. Une immense machinerie humaine et mécanique qui détruira la forêt comme ceux qui y vivent, qui réduira la vie à un lac de cyanure. Tout ça pour quelques paillettes d’or, pour des bijoux, des lingots et quelques soudures.

Mais ce qui se déroule en Guyane, ce n’est pas seulement la création d’une énième mine d’or, la perpétuation et l’extension de l’industrie de l’extraction, toujours prêt à ravager la terre et celleux qui y vivent. Ce qui se déroule là-bas, c’est la continuation du massacre, une autre salle de l’abattoir que certains nomment société.

« Avec l’intention de nuire à la Montagne d’or et au monde qui en a besoin, cet ouvrage est écrit par des individus profondément hostiles à toutes formes d’autoritarisme. C’est avec cette sensibilité que sont abordés la conquête du sous-sol de la Guyane réputée riche en or, son sol, sa géographie, ses populations et multiples réalités sociales. Voyageant de ronds-points en villages, de bureaux d’études en sites miniers, c’est une part de ce pays et de ses complexités qui tente d’être mise en mots avant de tirer les fils d’un entrelcas macabre : ceux de l’extraction minière qui s’intensifie sur ce territoire. »

Les éditions du couac, 190 p., septembre 2019
4 euros prix distro, 6 euros librairie
leseditionsducouac [arobase] riseup [point] net

 

Pensée anarchiste : Plaidoirie de Louise Michel

Louise Michel est accusée avec d’autres personnes d’avoir été, en mars 1883 à Paris, « les chefs et instigateurs du pillage, commis en bande et à force ouverte » de trois boulangeries suite à la manifestation de la place des invalides. Le procès, qui se tient du 21 au 23 juin 1883, la verra être condamné à six ans de prison assortis de dix années de surveillance de haute police, pour « excitation au pillage ». Décidée à se défendre elle-même, voici des extraits de sa plaidoirie, parus dans ses Mémoires.

« C’est un véritable procès politique qui nous est fait ; ce n’est pas nous qu’on poursuit, c’est le parti anarchiste que l’on poursuit en nous. […]

Il y a une chose qui vous étonne, qui vous épouvante, c’est une femme qui ose se défendre. On n’est pas habitué à voir une femme qui ose penser ; on veut selon l’expression de Proudhon, voir dans la femme une ménagère ou une courtisane !

Nous avons pris le drapeau noir parce que la manifestation devait être essentiellement pacifique, parce que c’est le drapeau noir des grèves, le drapeau de ceux qui ont faim. Pouvions-nous en prendre un autre ? Le drapeau rouge est cloué dans les cimetières et on ne doit le reprendre que quand on peut le défendre. Or, nous ne le pouvions pas. […]

Je suis allée à la manifestation, je devais y aller. Pourquoi m’a-t-on arrêtée ? J’ai parcouru l’Europe, disant que je ne reconnaissais pas de frontières, disant que l’humanité entière a droit à l’héritage de l’humanité. Et cet héritage, il n’appartiendra pas à nous, habitués à vivre dans l’esclavage, mais à ceux qui auront la liberté et qui sauront en jouir. […]

On a acquitté M. Bonaparte et on nous poursuit ; je pardonne à ceux qui commettent le crime, je ne pardonne pas au crime. Est-ce que ce n’est pas la loi des forts qui nous domine ? Nous voulons le remplacer par le droit, et c’est là tout notre crime !

Au-dessus des tribunaux, au-delà des vingt ans de bagne que vous pouvez prononcer, au-delà même de l’éternité du bagne si vous voulez, je vois l’aurore de la liberté et de l’égalité qui se lève. Et tenez, vous aussi, vous en êtes las, vous en êtes écœurés de ce qui se passe autour de vous !… Peut-on voir de sang-froid le prolétaire souffrir constamment de la faim pendant que d’autres se gorgent.

Nous savions que la manifestation des Invalides n’aboutirait pas et cependant il fallait y aller. Nous sommes aujourd’hui en pleine misère… Nous n’appelons pas ce régime-là une république. Nous appellerions république un régime où on irait de l’avant, où il y aurait une justice, où il y aurait du pain pour tous. Mais en quoi votre République diffère-t-elle de l’Empire ?

Je n’ai pas voulu que le cri des travailleurs fût perdu, vous ferez de moi ce que vous voudrez ; il ne s’agit pas de moi, il s’agit d’une grande partie de la France, d’une grande partie du monde, car on devient de plus en plus anarchiste. […] Sans l’autorité d’un seul, il y aurait la lumière, il y aurait la vérité, il y aurait la justice. L’autorité d’un seul, c’est un crime. Ce que nous voulons, c’est l’autorité de tous. M. l’avocat général m’accusait de vouloir être chef : j’ai trop d’orgueil pour cela, car je ne saurais m’abaisser et être chef c’est s’abaisser. […]

On ne connaît de patrie que pour en faire un foyer de guerre ; on ne connaît de frontières que pour en faire l’objet de tripotages. La patrie, la famille, nous les concevons plus larges, plus étendues. Voilà nos crimes.

Nous sommes à une époque d’anxiété, tout le monde cherche sa route, nous dirons quand même : Advienne que pourra ! Que la liberté se fasse ! Que l’égalité se fasse, et nous serons heureux ! »

Source : https://fr.theanarchistlibrary.org/library/louise-michel-memoires

La militarisation de nos vies

Cela fait plusieurs années que la jeunesse a été débarrassée du service militaire, mais cela n’a pas mis fin à la présence de l’armée dans nos existences. Depuis quelques années, les assassins en kaki essayent de nouveau d’étendre leur contrôle. C’est ces campagnes de recrutement incitant les plus pauvres à aller mourir au loin pour le service d’exploiteurs, ce sont ces stages de team building dans les casernes mais c’est aussi le Service National Universel (SNU).

C’est quoi le SNU ? C’est un service civique d’un mois obligatoire entre 15 et 16 ans qui doit être généralisé vers 2021. Pour un coût d’au minimum 1 500 000 000 € par an. Pour faire quoi ? Pour « transmettre un socle républicain » et « renforcer la cohésion nationale ». Dans la pratique, cela correspond à se lever à 7h du matin pour des saluts au drapeau et chanter la marseillaise. Ils auront aussi la joie de jouer le planton lors des cérémonies officielles ou de se faire diriger par des allumés du képi. Il s’agit bien évidemment d’inculquer la soumission à l’autorité et le nationalisme. Une deuxième phase est prévue où celles et ceux qui se sont reconnus dans la pensée de caserne pourront aller jouer les grouillots pour les flics et les militaires.

Mais voilà, les militaires ne sont pas les seuls à organiser cette grande offensive sur la jeunesse, de nombreuses associations ont décidées d’être complice. Ces associations ont signé des conventions partenariales, dont les suivantes sont présentes sur Poitiers.

La ligue de l’enseignement / Familles rurales / Croix rouge française / Céméa / Unis Cité Poitiers / Union nationale de l’information jeunesse / Fédération française de sauvetage et de secourisme / Afev / Protection civile / Jeunesse au plein air

Pour un anti-militarisme offensif !

Source : http://journaldecole.canalblog.com/archives/2019/06/09/37415619.html

Texte par Sorg | Image de propagande

 

Les prêtres sont partout

Si je vous parle d’un prêtre, je pense que les premières images qui vous viennent à l’esprit sont celles d’un clerc en costume. Un curé en soutane, un moine bouddhiste en kesa, un imam en kami ou autres religieux avec son déguisement. Mais le prêtre ne limite pas sa tâche à jouer les intermédiaires pour une divinité imaginaire, il est partout où l’autorité à besoin de lui pour nous enseigner la résignation dans la souffrance. C’est autant celui qui, au temple, nous dresse dans l’attente de l’apocalypse, du retour ou de l’arrivée du messie que tous les autres qui nous invitent à ronger notre frein en attendant des jours meilleurs. Ce sont ces politiciens qui nous disent de nous tenir à carreau en attendant le prochain cirque électoral qui leur permettra de s’empiffrer de homards et de vins, c’est ceux qui nous disent de rester dans des mariages de malheur, qui partout nous incitent à renoncer à mieux. Ce sont aussi ces révolutionnaires qui attendent l’insurrection en créant des partis comme on construit des églises. La révolution n’est pas une révélation divine, une apocalypse des exploités, c’est nous, pour nous, ici et maintenant. Le prêtre n’est qu’un des innombrables maillons de la chaîne humaine qui maintient cette société avariée. Le prêtre c’est cette figure qui nous pousse à la résignation, cette icône qu’on doit détruire, pour enfin vivre sans maître à penser.

Sorg

Actu dans le jus de décembre

Depuis le 5 décembre et la première manif contre la réforme des retraites et ce système qui nous broie, Poitiers est sortie de sa torpeur, plusieurs rassemblements et actions s’enchaînent chaque jour. On vous propose des récits et analyses, glanés sur les lieux de luttes.

Les manifs du 5 décembre et leurs conséquences

« Même si on se fout des chiffres, voir autant de monde à Poitiers dans la manif contre la réforme des retraites, ça fait plaisir. C’était un peu comme la rentrée des classes : on se retrouve, on se rencontre, en espérant faire un bout de chemin ensemble. Une tentative de sortir du parcours déposé entraîne un coup de pression des flics, pour le reste, on a marché longtemps. La manif s’est terminée devant la préfecture, et une partie des manifestant·es est partie squatter devant le comico. Alors que les bleues commençaient à nous encercler, nous sommes parties en manif sauvage, direction le centre commercial des Cordeliers. Malgré le zèle des vigiles qui ont lamentablement tentés de nous arrêter physiquement, nous avons pu gueuler collectivement notre rage et notre haine de la société capitaliste et de ses avatars. La spontanéité est efficace pour contrecarrer les forces répressives.

Pourtant, cette escapade sauvage n’est pas restée sans conséquences. Lors de la manif du 10, la police se fait plus présente encore, en costume et en civile, remontant constamment les deux côtés du cortège et bloquant les rues le long du parcours, notamment l’accès menant aux Cordeliers. A la fin de la manif à Porte de Paris, le quartier est quadrillé, les flics sont partout. Une personne partant avec une banderole où figurait ACAB est arrêtée, et des lycéen·nes sont emmerdé·es. Soyons solidaires face à la répression ! »

Blocages du 6 et 11 décembre

« Le 6 décembre, le dépôt de bus Vitalis situé 9 avenue de Northampton a été bloqué dès 4h00 du matin par des grévistes et personnes en lutte. Le 10, c’était un centre industriel de tri postal qui était bloqué dès 19h suite à un rassemblement dans un autre lieu pour garder la surprise.

Il y a de nombreuses leçon à tirer de ces actions. Les effets du blocage ne se limitent pas à la durée durant lequel il est effectif. Celui de Vitalis a été levé vers 9h, mais le trafic de bus n’a repris son cours qu’à partir de 10h30. Ce moment joyeux et dansant à su briser un peu de la normalité mortifiante d’un vendredi matin à Poitiers.

De même, s’il n’a duré que quatre heures, le blocage du centre postal couplé à des grèves coordonnées a permis d’enrayer la machinerie bien huilée de la distribution du courrier pendant plusieurs jours.

Ces deux blocages se sont fait sur des appels de la CGT, dont les responsables n’ont eu aucun remord à serrer la main des policiers alors que ces derniers viennent, casqués et matraques à la main, mettre fin au blocage de Vitalis. Les flics iront jusqu’à sortir les boucliers pour les vidéos de la presse et les selfies des militant·es syndicaux·ales.

Si nous avons passé de bons moments, il faut tout de même s’interroger sur l’attitude de la CGT qui semble avoir négocié avec les flics et le patronat l’organisation de ces blocages, conduisant possiblement à en diminuer les effets. Ainsi en 2010, lors du mouvement contre la réforme des retraites, l’intersyndicale organisait des simulacres de blocage négociés en amont avec la préfecture et les patrons. Les marchandises étaient déjà parties lorsque les actions commençaient. »

12 décembre lycéen·nes en action

« Comme depuis quelques jours, les lycéen·nes sont déter : piquet de grève à Nelson Mandela, blocage à Victor Hugo et au LP2I, manif sauvage jusqu’à Camille Guérin pour inciter les copaines à les rejoindre…

Le même jour à Victor Hugo, 5 flics arrêtent une personne. Le journaliste de la NR recrache la version policière et parle de jet de projectile alors que l’interpellation violente fait suite à un contrôle d’identité. »

Qui que tu sois protèges-toi ! Autodéfense face à la police et la justice en dernière page.

pot-au-feu

Poitiers la cloisonnée

Poitiers, c’est une ville, un espace, avec ses codes, son histoire, ses fonctionnements. Avec ses habitants et ses sociabilités. Avec ses individus et ses collectifs. A Poitiers comme ailleurs, les institutions – monde du travail, famille, État – isolent de plus en plus les personnes et fragmentent les vies.
A Poitiers aussi, on fait face à une épidémie de solitude, inoculée par les institutions et propagée par les individus et même les collectifs. Et cette épidémie peut tuer. Elle peut tuer les individus – les personnes isolées ont une espérance de vie réduite – mais aussi les envies, les dynamiques, les espoirs, les projets, les luttes et les collectifs.

Quand on arrive à Poitiers, on n’est pas étouffé par la convivialité. L’interconnaissance est à la base des relations, à la base de la possibilité même des relations. Alors quand on ne connaît personne, on ne rencontre personne.
Et quand on fréquente des collectifs – sport, jeux, culture, art, aide, lutte, etc – il est difficile de dépasser l’objet du collectif pour se lier. On fait des choses ensemble, et puis on repart à sa vie. Le cloisonnement est érigé en norme.
A Poitiers, l’histoire joue un rôle considérable. Chaque groupe a son histoire, qui explique sa forme, son évolution, ses choix. Mais cette histoire n’est presque jamais transmise, des noms ou des événements étant parfois évoqués pour servir d’argument d’autorité, sans plus de détail ni de contexte. Comment participer à un jeu dont on ne connaît pas les règles ?

Les histoires et les relations interpersonnelles fragmentent la vie à Poitiers. Personne n’ira à tel événement qui se passe dans tel lieu tenu par tel collectif parce qu’autrefois, untel en faisait partie. Telle action est impossible au vu de ce qui s’est passé telle année. Unetelle n’est pas fréquentable parce qu’elle fait partie de tel collectif. Unetelle ne peut pas discuter avec untel parce que ce qu’il dit s’inscrit dans tel contexte faisant référence à tels événements qu’elle ne connaît pas et qu’il ne pense pas nécessaire d’expliciter.
A Poitiers, construire des relations prend énormément de temps. Construire de la confiance en prend beaucoup plus. En attendant, la solitude s’étend.

Pourtant, on sait que la coopération est extrêmement bonne pour la santé et pour la vie. Que l’isolement renforce et pérennise le capitalisme et tous les systèmes de domination et d’oppression. Comment faire face quand on est seul·e ? Quelles forces a-t-on, seul·e ? On n’en a pas, ou très peu. Dans ce monde, et à Poitiers, communiquer devient un acte de résistance. Pour résister au capitalisme et à son monde d’isolé·es, soyons ouvert·es et attentionné·es vis-à-vis des autres, et ne restons pas enferm·e·s dans nos groupes. Continuons à être critique mais arrêtons la méfiance systématique.
Parce qu’il est urgent de décloisonner Poitiers.

Image tintamarre | texte bastringue