Non mais allô quoi !

Il nous viendrait jamais à l’idée d’inviter un flic à table, à une réunion ou en soirée. Pourtant en transportant un téléphone portable, et plus encore un smartphone, c’est bien les yeux et les oreilles de la surveillance que l’on invite en permanence dans sa vie.
Pour pouvoir communiquer entre eux, les téléphones se connectent à des antennes-relais. En recoupant les informations obtenues à partir de ces connexions, les flics peuvent reconstruire nos déplacements. Ils peuvent aussi utiliser des IMSI-catcher qui se font passer pour une antenne-relais pour choper toutes les informations (numéros de tel, SMS, MMS, contenu des appels). Pour les smartphones, qui possèdent des balises GPS, la précision est encore plus grande. Les données de localisation ainsi récoltées sont utilisées par les entreprises, aussi bien pour faire de la publicité géolocalisée qu’avec d’autres données pour obtenir des informations importantes sur nous permettant de nous exploiter toujours plus. Il est possible de connaître la fréquence des visites chez le médecin, le temps passé au domicile d’une personne et quelles étaient les autres personnes présentes à ce moment si elles aussi sont venues avec leurs smartphones.

De plus les micros des téléphones peuvent aussi être activés à distance et servir à nous espionner, que ce soit par google pour nous vendre des trucs ou par l’État pour nous surveiller. Ce dernier a d’ailleurs entrepris l’achat de 500 « kiosques », des dispositifs pouvant aspirer toutes les informations contenues dans le téléphone : les sms, les photos, les vidéos, les courriels, l’historique des navigations internet et de la géolocalisation, les historiques de mots de passe, le carnet d’adresse, les données, les notes et les messages des applis comme Snapchat, Facebook et même ceux des applis réputés sécurisées comme Signal ou Télégram ainsi qu’une partie des données supprimées.
Sans compter les diverses applications installées sur les smartphones, qui n’hésitent pas à demander de multiples accès dont elles se servent uniquement pour choper des infos sur toi : données de géolocalisation, accès au micro, aux images, aux sms, etc. Si en installant un jeu l’appli demande accès à la caméra, au répertoire et au journal d’appel, il faut s’inquiéter pour sa vie privée. Si tu es sous android, tu peux utiliser le store f-droid pour chopper des applis open-source et respectueuse de la vie privée. Tous ces mouchards peuvent également servir à tes proches pour t’espionner.
Le meilleur moyen de se protéger de tout ça reste de n’avoir ni smartphone ni téléphone. Mais il est quand même possible de se protéger un minimum, en se débarrassant des applications les plus intrusives du genre Facebook, Instagram, Snapchat ou autres. En installant un système d’exploitation open source qui ne soit pas conçu par les GAFAM. En se rappelant que les smartphones sont aussi des ordinateurs et que les bonnes pratiques à adopter pour l’un valent pour l’autre. En plus efficace, retourner à un modèle de téléphone qui ne soit pas un smartphone est aussi un bon choix.

Image : un cognito | texte : pot-au-feu

Amazones

par les Chiennes Hi-Fi

On mettra sans dessus-dessous le confort de leur zone
La refaire à notre sauce
Paraît qu’on leur prend la tête
Faire la queue, les sucer dans des secondes zones
Le glas de ce monde klaxonne
Aujourd’hui on prend la tête
On mettra sans dessus-dessous le confort de leur zone
La refaire à notre sauce
Paraît qu’on est pas des bêtes
Si tu erres sur les terres des Amazones
Tu fais partie de la faune
Ici les rois perdent la tête

À la fin de mes concerts, des girls en masse viennent me dire que mon son défonçait
Que des gonzesses, cette exclusivité me déconcerte me retourne le veau-cer
Pourquoi ya que des go, merde ?
Est-ce que les mecs se concertent,
Sont pas concernés ?
Pourtant ils cernaient la zone lumineuse de devant la scène.
Mon cerveau vocifère : mais putain qu’est-ce qu’il faut faire
pour voir ma musique leur plaire ?
Parler de biz, de cannabis, ou simplement me faire pousser la bite ?
Toutes ces questions m’habitaient
Ces questions m’abîmaient
Pendant longtemps ça m’a minée
Maintenant c’est terminé.

Pourquoi j’aurais besoin de leur adhésion
J’ai déjà celle de mes reuss
On se passera de leur permission
pour mettre le feu en masse
aujourd’hui le rap intéressant
il est fait par des meufs
Prends de l’espace vas-y passe devant
on va faire de la place

Pourquoi j’aurais besoin de leur adhésion
J’ai déjà celle de mes reuss
Peu de chances de gagner leur admiration
pour autre chose que mes seufs
Si on peut pas faire avec, on fera sans
Épaisse est la cuirasse
On va leur mettre les oreilles en sang,
Honneur à notre race

Assez parlé d’eux, avec eux, par les temps qui courent
Mieux vaut taper dans le tas que parler ! On est parties pour
abolir les pourparlers,
la relève sur les remparts, pagnes léopards, griffes au nail-bar,
Bander de l’arc c’est girly
Élevées comme des chiennes en matière d’amitié, il nous reste tout à apprendre :
Mordre le maître pour retrouver la meute, et le mettre à l’amende.
Hystériques et déchainées, nique les thérapeutes, vive les garces,
plus de compassion quand le coup part,
les hommes viennent de Mars et les femmes de l’émeute

Il a souffert, c’est pour ça qu’il te cogne ?
Qu’il se paye un psychologue !
C’est offensant quand tu romps le dialogue ?
Qu’il se trouve un pédagogue !
Barbie a quitté le catalogue,
ils auront beau rire et se moquer,
leur ouroboros va se la gober tout seul sa grosse queue,
t’es déjà bookée.
Il t’a trahie ça fait mal, solidarité de mâle, que croyais-tu que tu valais ?
Un srab, un ami quand il t’appelait « ma couillasse, ma poto » ? mais t’étais qu’une go
Reste à ta place ou menace son égo.
On vivra d’amitié et d’eau, « bendo na bendo », tout ce qui coule dans nos gorges c’est du flow.

S’ils en réchappent c’est de justesse,
Nos flèches ne sont pas bénignes
Quand les violées se feront justice
Les juges seront en première ligne
Une femme c’est doux c’est facile
pourtant je suis pas si pacifiste
Mon geste ajuste sa cible
Passe pas dans le champ t’es passible
De figurer sur ma liste

Paraît qu’une femme c’est doux c’est fragile
Il paraît, il paraît
Paraît qu’une femme c’est doux c’est fragile
Il paraît, il paraît
Paraît qu’une femme c’est doux c’est fragile
Il paraît, il paraît
Paraît qu’on leur prend la tête !
On mettra sans dessus-dessous le confort de leur zone
La refaire à notre sauce
Paraît qu’on est pas des bêtes
Si tu erres sur les terres des Amazones
Tu fais partie de la faune
Ici les rois perdent la tête
Aujourd’hui j’en place une pour mes Amazones, pour mes jolies mômes pour mes zouz pour mes gonz’, pas pour mes amis hommes
Pour celles qui chialent dans la loose, pour celles qui déraisonnent
Tenez bon ensemble on cramera la camisole !

Pensée anarchiste : le criminel, c’est l’électeur !

Albert Libertad (1875 – 1908) est le fondateur du journal L’anarchie. Que ce soit dans ses articles ou dans la rue, il ne cessera d’appeler à jouir de la vie sans attendre. A vivre ici et maintenant librement, débarrassé·es de tout préjugé moral et religieux. De la caserne à la cathédrale, du travail au mariage en passant par le syndicat, aucune des idoles de cette société n’est épargnée par ses critiques. Il n’hésite notamment pas à s’attaquer à la résignation des foules comme dans cet article paru en 1906 dans L’anarchie.

« Les gouvernants quels qu’ils soient, ont travaillé, travaillent et travailleront pour leurs intérêts, pour ceux de leurs castes et de leurs coteries.
Où en a-t-il été et comment pourrait-il en être autrement ? Les gouvernés sont des subalternes et des exploités : en connais-tu qui ne le soient pas ? […]
Tu te plains de tout ! Mais n’est-ce pas toi l’auteur des mille plaies qui te dévorent ?
Tu te plains de la police, de l’armée, de la justice, des casernes, des prisons, des administrations, des lois, des ministres, du gouvernement, des financiers, des spéculateurs, des fonctionnaires, des patrons, des prêtres, des proprios, des salaires, des chômages, du parlement, des impôts, des gabelous, des rentiers, de la cherté des vivres, des fermages et des loyers, des longues journées d’atelier et d’usine, de la maigre pitance, des privations sans nombre et de la masse infinie des iniquités injustices sociales.
Tu te plains ; mais tu veux le maintien du système où tu végètes. Tu te révoltes parfois, mais pour recommencer toujours. C’est toi qui produis tout, qui laboures et sèmes, qui forges et tisses, qui pétris et transformes, qui construis et fabriques, qui alimentes et fécondes !
Pourquoi donc ne consommes-tu pas à ta faim ? Pourquoi es-tu le mal vêtu, le mal nourri, le mal abrité ? Oui, pourquoi le sans pain, le sans souliers, le sans demeure ? Pourquoi n’es-tu pas ton maître ? Pourquoi te courbes-tu, obéis-tu, sers-tu ? Pourquoi es-tu l’inférieur, l’humilié, l’offensé, le serviteur, l’esclave ?
Tu élabores tout et tu ne possèdes rien ? Tout est par toi et tu n’es rien.
Je me trompe. Tu es l’électeur, le votard, celui qui accepte ce qui est; celui qui, par le bulletin de vote, sanctionne toutes ses misères ; celui qui, en votant, consacre toutes ses servitudes.
Tu es le volontaire valet, le domestique aimable, le laquais, le larbin, le chien léchant le fouet, rampant devant la poigne du maître. Tu es le sergot flic, le geôlier et le mouchard. Tu es le bon soldat, le portier modèle, le locataire bénévole. Tu es l’employé fidèle, le serviteur dévoué, … l’ouvrier résigné de ton propre esclavage. Tu es toi-même ton bourreau. De quoi te plains-tu ? […]
Tu es un danger à l’égal des tyrans, des maîtres que tu te donnes, que tu nommes, que tu soutiens, que tu nourris, que tu protèges de tes baïonnettes, que tu défends de ta force de brute, que tu exaltes de ton ignorance, que tu légalises par tes bulletins de vote, …
Si des candidats affamés de commandements et bourrés de platitudes, brossent l’échine et la croupe de ton autocratie de papier ; Si tu te grises de l’encens et des promesses que te déversent ceux qui t’ont toujours trahi, te trompent et te vendront demain : c’est que toi-même tu leur ressembles. C’est que tu ne vaux pas mieux que la horde de tes faméliques adulateurs. C’est que n’ayant pu t’élever à la conscience de ton individualité et de ton indépendance, tu es incapable de t’affranchir par toi-même. Tu ne veux, donc tu ne peux être libre.
Allons, vote bien ! Aies confiance en tes mandataires, crois en tes élus.
Mais cesse de te plaindre. Les jougs que tu subis, c’est toi-même qui te les imposes. Les crimes dont tu souffres, c’est toi qui les commets. C’est toi le maître, c’est toi le criminel, et, ironie, c’est toi l’esclave, c’est toi la victime. […]
Allons, un bon mouvement : quitte l’habit étroit de la législation, lave ton corps rudement, afin que crèvent les parasites et la vermine qui te dévorent. Alors seulement tu pourras vivre pleinement.
LE CRIMINEL, c’est l’Électeur ! »

La Glane ça vous gagne !

La glane – ou récup – faut juste passer le cap, sortir des pensées moralisatrices qui nous trottent dans la tête, du genre : il y a des personnes pour qui c’est vital et moi non, et bien redonne, partage et rassure toi il y a souvent assez pour touste le monde ; on va me regarder chelou et bien emmerde leurs normes, organise-toi avec d’autres pour être plus fort·e.

Glaner c’est une manière de dire merde au capitalisme, à l’industrie alimentaire qui crée autant de déchets qu’elle produit de bouffe, de ne pas filer de thune aux patrons, de manger parfois des trucs que je ne pourrais jamais me payer, de régaler les copaines, de faire des cantines de soutiens pour mille et une choses. A Poitiers, c’est pas le paradis, beaucoup de supermarchés ont rendus inaccessibles leurs poubelles notamment les grandes surfaces, et les marchés c’est irrégulier, mais faut pas désespérer pour autant, reste déter !

Petit à petit
Pour commencer, le plus simple c’est de glaner en fin de marché. Il y a souvent des cagettes visibles avec des fruits et légumes dans des états plus ou moins chouettes, allant de la salade pré-compostée à la belle carotte juste tordue.
Quand tu rentres de glane c’est pas mal de prendre le temps de virer les parties moisies pour conserver les légumes plus longtemps et de tout laver. Il n’y a aucune « garantie fraîcheur » donc ça arrive que ton estomac soit mis à l’épreuve. Il y a des légumes qui tournent plus vite que d’autres, même après avoir été cuisiné. Conserve ça bien au frais et fait confiance à ton odorat et tes papilles, si c’est acide ou que ça pétille… c’est loupé. On parle souvent de javel balancée par des raclures, là aussi vu l’odeur tu ne peux pas te tromper, ça doit exister mais j’en ai jamais croisé. Sache que le proprio du conteneur est responsable de ses déchets donc tu peux porter plainte pour intox à la javel.

Aller à la source
Les fins de marchés : il faut capter l’heure ou les commercant.es commencent à remballer et donc jettent des trucs mais ou le service de nettoyage n’est pas encore passé. Les jours de beaux temps ça traîne plus que quand il fait moche. Tu peux aussi y aller direct et demander stand par stand si ielles n’ont pas des trucs à jeter. C’est un peu à la tête du client·e je trouve.
Les biobiotrucs : la majorité laisse leurs conteneurs accessibles, ou laisse les végétaux dehors le soir, certains donnent les invendus à des asso.
Les supermarchés : de plus en plus se dotent de compacteurs, ça se voit notamment sur une vue aérienne car il n’y a pas d’espace poubelle à l’air libre. Ceux-là c’est mort. Pour les autres qui ont barricadé leurs poubelles derrière des palissades ou dans des cages, tu peux guetter quel jour ielles les sortent dans la rue. Et il y en a encore qui ont leurs conteneurs accessibles, souvent derrière le magasin.

Qu’est-ce qu’on mange ?
J’espère que tu aimes les légumes car c’est quand même l’essentiel de ce que tu peux choper facilement. Dans les conteneurs ça mélange parfois végétaux et produits d’origine animale. A toi de voir ou de sentir et d’adapter à tes limites ou tes choix alimentaires. L’été faut oublier tout de suite ce qui est d’origine animale, avec la chaleur il y a des risques que ça ait tourné voir que la vie ait repris le dessus d’une autre manière.

Du côté de la loi
Si les poubelles sont sur l’espace public (trottoir, place de marché, route) tu peux y aller peinard·e, tu as pour une fois le droit avec toi. Il est tout de même possible que les gérant·es ou les riverain·es viennent te saouler. Quand c’est derrière ou à côté des magasins, même sans connaître le statut exact de l’espace (privé ou public), perso je ne me suis jamais fait emmerder dans ce genre d’endroit car les poubelles restent accessibles.

Matos
Une lampe frontale s’il fait nuit, des gants en plastiques, des sacs ou autre pour trimballer tes trouvailles (parfois ça jute un peu).
Pour que ça continu pour toi et les autres, pense à bien remettre tout ce que tu as sorti et laisse propre derrière toi.


par ben

Food not bombs : le jeudi

Cette année c’est le jeudi que des gens sur Poitiers se retrouvent sous les toits ouverts du marché notre dame, en face de l’office du tourisme, pour partager un repas ! Déjà en place pendant l’hiver 2018-2019, Food not bombs, une initiative connue qui consiste à s’organiser pour récupérer des invendus, les cuisiner (cuisine végétalienne, pour que tout le monde puisse manger) et les emmener dans le centre ville ! Le repas est ensuite partagé, avec mise à disposition de cendre de bois pour faire sa lessive maison, de graines de kéfir, de petits fanzines DIY (dont la Sinse) et des vêtements ! Quand la récup est bonne vous trouverez aussi des légumes ! L’espace est ouvert à quiconque souhaite manger, cuisiner, et limiter le gâchis lié aux invendus des épiceries et marchés de Poitiers!

Tout est gratuit, et le lieu ne distribue pas d’alcool.

Les besoins ? Des bras à 19h et 21h pour brasser le matériel, des plats végétaliens, de la bienveillance et de l’autogestion.
A vos fourchettes (elles sont fournies) et bon ap !

Ca s’est passé et à venir

Que crève la compétition !
Le 15/02 au TAP Castille

« Le jury de la compétition internationale de la 11ème édition du festival Filmer le travail à Poitiers, a décidé à l’unanimité de substituer la solidarité à la compétition. Il a annoncé lors de la cérémonie de clôture, qu’il attribuait les trois prix «_grand prix filmer le travail, Restitution du travail contemporain et Valorisation de la recherche_», à l’ensemble des films sélectionnés.
Par ce geste, il s’associe aux luttes interprofessionnelles actuelles, et signifie qu’il s’oppose aux politiques néolibérales qui maltraitent le travail, généralisent la concurrence et détruisent les solidarités. »
Une initiative qu’on ne peut que saluer même s’il est toujours dommage de devoir attendre une lutte, un contexte spécifique pour le faire. C’est tous les jours que nous devrions faire preuve de solidarité. Quant à la compétition, elle devrait disparaître de nos vies à tout jamais.

SOIRÉE DE SOUTIEN
pour l’ouverture d’un centre socioculturel en autogestion
Samedi 21 mars à partir de 20h
au Zinc – Poitiers

L’envie est bien vivante pour de nombreuses personnes de créer à Poitiers un espace de rencontre, de partage, d’échange de pratiques, de savoirs et autres joyeusetés. L’idée c’est de se retrouver autour de valeurs communes, la volonté d’une organisation en totale autogestion et le désir d’une ouverture à touste.

Si toi aussi l’aventure te botte, que t’es curieux.se, que t’as envie de filer un coup de main ou autre, boire un jus de carotte ou juste de passage dans le coin, viens donc !

Programme musical en cours de création/bouffe végan/prix libre

Contre l’amour

« L’amour est un dieu. On communie avec lui dans l’extase la plus complète. On l’attend au tournant, on l’appelle au secours, on rêve d’être touché-e par sa grâce, on craint ses courroux plus que tout. On l’adore. On le prie, le soir dans son lit, de se manifester. Il nous sauvera. »
« L’Amour, c’est une forme d’échange affectif totale. Totalisante. Totalitaire. L’Amour, c’est toutes les formes d’échanges affectifs réunies. Un monstre, un léviathan, une hydre à moultes têtes._»

Cinq textes courts pour abandonner l’Amour avec un grand A, l’Amour mièvre, romantique, exclusif, hétéronormé, codé, catégorisé, possessif… Et pour entamer la construction d’une affection abondante, sans dominations et sans dépendances. Petites analyses de la culture de l’Amour, idées pour s’en défaire progressivement.

Pour lire la brochure : infokiosques.net/spip.php?article158

Moudre l’amour

L’amour c’est quoi ? Un sentiment. Un sentiment qui lie des personnes entre elles. C’est aussi une norme. Parce qu’avec le mot amour, viennent rapidement en tête des images : deux personnes, l’exclusivité et la fidélité, la vie sexuelle, la vie commune, le PACS ou le mariage, le ou les enfants. Comme ça, d’instinct, sans plus y réfléchir. Une norme, c’est un état répandu, moyen, souvent considéré comme une règle à suivre. Une norme, c’est puissant et ça nous dépasse. Cette norme, elle nous oblige.
D’où elle vient ? De partout. Partout autour de nous. Notre famille, nos ami·es, les gens qu’on fréquente. La plupart des personnes autour de nous sont en couple ou cherchent à l’être. Dans la littérature, le cinéma, la peinture, le théâtre, la musique, à la télé, à la radio. Dans la plupart des fictions, des documentaires, des reportages, les personnages sont en couple ou cherchent à l’être.
Et même les personnes qui refusent cette norme font en fonction d’elle. Quand on ne veut pas d’exclusivité, on parle d’amour libre, quand on veut plus qu’une relation à deux, on parle de polyamour. Les mots qu’on utilise, et derrière eux les réalités qu’ils décrivent sont enfermées dans cette vision de l’amour. Parce qu’il faut constamment se définir par rapport à elle. Et ça tue nos imaginaires.
L’amour, cet amour-là, est donné comme la chose la plus désirable sur Terre. Comme le moyen le plus noble d’atteindre le bonheur. Alors que c’est l’un des outils de contrôle social le plus puissant qui existe. Il façonne nos vies, des vies toutes pareilles qui restent dans le cadre, sans déborder. Pour habiter ensemble, il faut louer ou acheter, et donc de l’argent, et donc travailler. Tout comme une fois les enfants né·es, pour les couches, les jouets et la bagnole. Et puis pour montrer son amour, il faut offrir des choses. Il faut faire des efforts pour l’autre, abandonner tout ou partie de ses envies, de ses désirs. Et ne pas prendre de risque, pour ne pas faire de torts à l’autre. Et à force de s’oublier, cet amour-là rend malheureux. Toujours.
Même si on cherche à ne pas être dans cette norme, à ne pas penser et se définir en fonction d’elle, le monde et les personnes qui nous entourent nous y forcent. Nous vivons dans un monde d’amour factice et subit. Qui restreint nos envies et la possibilité même de nos envies. Même consenti par toutes les personnes concernées, se sourire, se parler, se toucher, s’embrasser, se câliner, se caresser n’est pas dépendant des envies de chacun⋅e, mais des situations vis-à-vis de l’amour et du regard des autres. L’hypocrisie est alors généralisée : on ne fait pas ce qu’on désire, mais ce que la norme nous impose. Ou ce qu’on croit qu’elle nous impose.
Le problème n’est pas que deux personnes aient envie de passer du temps ensemble, de baiser seulement ensemble, et tout l’reste. Mais que ce soit la seule option envisagée et souvent envisageable dans cette société mortifère. Tellement que cela bloque nos imaginaires. Qu’on en reste à des formes assez proches de la norme même quand on souhaiterait péter tout ça. Qui aimer ? Comment aimer ? Il est important d’en parler, dans des groupes, à ses proches, à des inconnu⋅es de passage. Pour péter la norme. Nourrir collectivement nos imaginaires. Et faire évoluer les possibles.

Déchirez les petits papiers

À la mi-mars se tiendront dans toute la France les élections municipales. Et comme pour chacun des rituels du cirque démocratique, les vendeurs de bonnes paroles vont de logements en logements, rôdent sur les marchés, distribuant promesses et prospectus. On pourra alors, en laissant glisser ses yeux sur le papier glacé, rêver un peu de l’avenir que l’on nous vend. Comme lorsqu’on achète des jeux à gratter. S’imaginer un autre futur, façonné par des bouts de papier. Les élections sont depuis longtemps rejetées par celles et ceux qui souhaitent vivre sans chef.fes, et de plus en plus par le reste de la population. Pourtant, lorsqu’il s’agit des municipales, un autre discours s’immisce dans les belles paroles. Et certain.es en arrivent presque, à mots couverts, à appeler à voter voir même à participer à ces élections-là.
Pourtant les municipalités ne sont pas des institutions à part, ce sont elles aussi des structures au service de l’ordre établi. Armement de la police municipale, installation de caméras de vidéo-flicage, aménagements urbains au service des plus aisés, bétonisation… Tout cela n’est pas le résultat d’une couleur politique plus qu’une autre mais la réalité de l’exercice du pouvoir. Équiper les serviteurs, contrôler les réfractaires, favoriser son groupe social, marquer l’exercice du pouvoir dans le paysage.
On ne peut pas concevoir notre libération au sein des structures conçues par et pour la domination. Toute structure de contrôle, toute organisation qui prétend vouloir régenter nos vies doit être détruite pour nous permettre d’exister. Celles et ceux qui veulent décider pour nous ne peuvent être nos copaines.
Comme pour la loterie, la fortune et le pouvoir de quelques-uns passent par le vol de toutes les autres. Alors cessons de participer à ces mascarades, de laisser d’autres choisir pour nous, cessons de rêver et passons à l’action. Désertons les bureaux de vote. Agissons ici et maintenant pour apporter dans ce monde celui que nous portons dans nos cœurs.