Les villes de servitude

Une des pratiques de la domination est de verrouiller totalement nos schémas de pensée pour que bien souvent même nos révoltes se déroulent dans la norme. Cette fermeture mentale empêche d’imaginer la possibilité d’un monde autre et donc d’agir pour mettre fin à celui-ci.
Ose-t-on seulement évoquer l’idée que les prisons doivent être rasées, et voilà que dans la tête des personnes avec qui on parle se lève une armée d’objections. Pourtant que l’on y adhère ou pas, il existe de multiples propositions de société sans prisons, certaines existent encore aujourd’hui. Certaines sont juste la continuité de ce monde, en proposant de transformer chaque appartement en cellule grâce aux bracelets électroniques. Celle que nous voulons représente une transformation largement plus radicale, puisqu’il ne s’agit pas de changer la manière de punir, mais de se débarrasser du besoin et de l’envie de punir. Mettre fin au vol en mettant fin à la propriété. Mettre fin aux viols en détruisant la culture du viol et le patriarcat. Mettre fin aux violences racistes en détruisant les races sociales et le colonialisme.
Ce verrouillage des imaginaires est clairement le produit de la propagande constante de l’état, du capital et du patriarcat, qui cherche à faire passer l’être humain comme naturellement mauvais et comme inévitable l’horreur quotidienne. Alors que c’est cette même propagande qui pourrit aussi les individus qui sont comme des éponges dans une fosse septique. À travers les médias, la publicité, les films, les séries et nombre de livres, une production culturelle permanente pour nous empêcher de voir que les rouages qui font tourner cette société peuvent non seulement être arrêtés, mais aussi détruits. Parce qu’on nous cache comment ces rouages ont été forgés et l’entretien constant qu’il demande.

Ce verrouillage mental se retrouve aussi dans le monde que nous parcourons à pied plutôt qu’en pensée. Une des illustrations les plus parlantes, c’est celle de toutes ces petites villes où l’économie repose sur quelques activités du pouvoir.
Comment les 7 200 habitant·es de Saint-Maixant l’école pourrait imaginer un monde sans armée quand toute la ville repose sur l’existence d’un lieu de formation annuelle de plusieurs milliers de bourreaux d’état ?
Comment penser un monde sans nucléaire dans l’ombre menaçante de la centrale de Civaux ? Une centrale qui apporte son lot d’ouvrier·es intérimaires (les plus exposé·es aux radiations) et d’absurdités en tout genre. Comme cette cage géante à crocodiles en plein cœur du poitou.
La ville de Vivonne, c’est 4 300 habitant·es, dont au moins 600 prisonnier·es des geôles de l’état. Et combien des 261 tortionnaires se sont installé·es sur place ? Entre 2009 (construction de la prison) et 2014, la commune est ainsi passée de 3 200 habitant·es à 4 200. L’ancien maire, Maurice Ramblière, ne cesse de se féliciter de la présence d’un lieu de torture et d’exploitation à longueur d’interview dans la presse. Sans contrat de travail, payé·e 1,23€ de l’heure (voir à la pièce), avec des comptes bancaires gérés par l’administration pénitentiaire, il est évident que ce genre de conditions fait saliver bien des employeurs (comme EDF, Renault, Yves Rocher, L’Oreal, Agnes B, Post It, Hachette, JC Decaux et d’autres).
Comment imaginer ce monde sans la prison, quand du voisin·e au buraliste, tous en « profitent » ? Nouvelle ligne de bus, écoles agrandies, trains régionaux augmentés, halle des sports, station d’épuration, et bien sûr une nouvelle gendarmerie.

Des prisons aux casernes en passant par le nucléaire, la domination n’est pas une accumulation de faits séparés. Elle est une immense toile qui partout s’étend.
La domination, ce n’est pas quelques personnes en costume et uniforme qui siègent dans des palais lointains. La domination, c’est aussi un ensemble de structures réparties sur tout le territoire.
Mais la domination est aussi dans la résignation quotidienne. Dans nos tolérances envers celleux qui permettent la reproduction de ce monde.
Et Poitiers dans tout ça ? De quoi la ville aux mille clochers de trop est-elle dépendante ? Ne serait-ce pas de cette tentaculaire université ?

Chiffre du mois : 2 000

C’est le nombre de tags qu’efface chaque année le service anti-tag de la mairie. Et avec près de 240 tags entre mi-mars et mi-avril, le duo fait tourner leur tout nouvel hydrogommeur (30 000 € tout de même). Soit un budget de 100 000 € par an pour cacher le fait que Darmanin est un violeur.

 

« Mort aux porcs »

Voilà quelques mots qui visiblement ont bien choqué Sacha Houlié, député de la 2e circonscription de la vienne. Quelques mots tracés sur la façade de son domicile et qui l’ont visiblement mis dans tous les états.
Ce n’est pourtant pas la première fois que des peintres s’en prennent à lui. Jusqu’à maintenant c’était surtout sa permanence (11 place de France, Poitiers) qui avait été re-décorée.
Visiblement peu fan des arts plastiques appliqués, il a su donner de la voix et traiter les artistes de « fascistes ». Or question fascisme, il s’y connait Sacha Houlié. Non content de ne pas s’opposer à la loi sécurité globale, il est le co-raporteur de la loi sur le « séparatisme ». Une loi qui vise avant tout à encore plus pourrir la vie des musulman·es et des personnes racisées. Renforcer le pouvoir de nuisance des flics, stigmatiser des minorités religieuses.

Halte aux cathos

Peut-être faites-vous partie de ces esthètes qui apprécient le charme discret des églises en ruines. De ces âmes poètes qui préfèrent les blasphèmes aux sermons. Que vous préférez les chemins et les sommets sans croix. Peut-être même que si dieu existait vous feriez partie de celleux qui le tuerait.
Alors vous serez ravis d’apprendre que la halte jacquaire des amis de saint jacques de compostelle, c’est-à-dire un hôtel pour pèlerins cathos est hébergé dans des locaux municipaux. Et vous serez ravis d’apprendre que les charges et le loyer ont été annulés lors des conseils municipaux de février.
Non contents de louer pour une bouchée de pain les églises, les cathos vont jusqu’à nous faire payers pour leur prétendue rédemption.
Et dans le même temps, leur église continue d’opprimer les gays, lesbiennes et trans, de s’opposer à la contraception et à l’avortement, et de défendre les pédophiles qui sévissent dans ses rangs.
Si vous aussi vous souhaitez profitez de l’hospitalité de la municipalité et de la chrétienté, sachez que la Halte jacquaire se trouve au 10 rue du Général-Demarçay, Poitiers.

Sélections contre le technomonde

7 mai 2019 à Kouaoua (territoires colonisés de kananie) : Incendie de la serpentine (une sorte de tapis roulant pour acheminer le minerai). L’incendie, comme les précédents, conduit à une interruption de l’activité minière jusqu’à la réparation.

3 janvier 2019 à la Limouzinière : Incendie d’une nacelle éolienne. Plusieurs semaines voir mois avant qu’elle puisse de nouveau produire de l’électricité.

7 janvier 2019 à Folles : Sabotage du mat de mesure éolien de la société Eolise. Le mat servait à prévoir l’implantation d’un parc éolien.

14 & 17 mai 2019 à Saint-Julien-Molin-Molette : Incendie d’engins de chantiers et d’utilitaires et de trois bâtiments algeco chez eurovia (entreprise du groupe Vinci) et dans une carrière. Revendiqués par des rapaces du Rajas sur nantes.indymedia.

11 février 2020 à Limoges : Incendie de 8 véhicules d’Enedis. Attaque revendiquée dans un courrier disponible sur labogue.info.

23 février 2020 à Gières : Incendie dans un immeuble hébergeant un laboratoire de recherche sur le domaine universitaire. Le laboratoire en question travaillait sur la mécanique du solide pour des applications dans le génie civil.

5 mai 2020 à Toulouse : Revendication de la crevaison de pneus de nombreuses voitures appartenant à “à l’état, au département, à Vinci, à SCS (une entreprise de télé-surveillance), à Enedis, à EDF, à un fournisseur gaz, à un installateur de fibre optique, un autre de télécom, à une entreprise de « Smart solutions pour industriels », à une agence immobilière”

23 juin 2020 à Erquy : Dégradations (dont tentative d’incendie) contre un véhicule de RTE (Réseaux de Transport d’électricité de france) alors que les agents réalisaient des études pour l’installation d’un parc éolien.

24 septembre 2020 à Pierrelatte : Sabotage de l’antenne 3 et 4G réalisé en cisaillant les câblages reliant l’antenne au réseau et à la fibre optique.

1er décembre 2020 au Massif de l’Étoile : Incendie dans un local technique au pied du pylôme de relais télévision du 2e plus important émeteur de télédiffusion. 3,5 millions de personnes privées de propagande télévisée et radiophonique. Le feu est parti de l’extérieur du site sur les câbles faisant le lien entre le local technique et l’antenne.

18 février 2021 à Brézins : Incendies visant la société Constructructel Constructions et Telecom, spécialisée dans le déploiement de réseaux de télécom et fibre optique.

19 février 2021 à Laz : Tags contre une centrale photovoltaïque portée par Total Quadran.

23 février 2021 : Revendications de deux incendies visant l’entreprise Constructel. Ont été ciblés l’antenne-relais, les bobines de câbles d’antennes et de fibres optiques.
Revendication disponible sur nantes-indymédia sous le titre “Et si les stocks de câbles venaient à brûler ?”.

4 mars 2021 à Château-Arnoux-Saint-Auban : Revendication de l’incendie des bureaux et d’un 4X4 de la société télécom GMS (filiale de Scopelec). Installateur de la 5G.

La 5G et le technomonde

Parait que la 5G est une invention formidable, graphique et chiffre absurde à l’appui. Que ce sera un véritable moteur pour la croissance, c’est-à-dire un nouveau moyen pour les exploiteurs d’accroitre leurs profits.
La 5G n’est qu’une des multiples briques des murs que la domination ne cesse de construire autour de nous. Des caméras pour nous fliquer dans la rue aux logiciels de reconnaissance faciale, en passant par l’utilisation de nos téléphones portables, véritables mouchards de poche. Mais la spécificité de la 5G et des autres briques de communication, c’est qu’elles permettent l’interconnexion de ces outils de domination.
Qu’elle soit au sommet d’un poteau, accrochée à un drone ou simplement entre les mains d’une pourriture en uniforme, la caméra reliée par internet aux serveurs de la police pourra utiliser les logiciels de reconnaissance faciale. On peut penser que le drone sera télécommandé aussi en utilisant la 5G. Et ces informations pourront être vérifiées en temps réel avec différents moyens de localisation des téléphones.
Sans interconnexions, tout ceci devient plus complexe à mettre en place voir tout simplement impossible. Les antennes-relais, les nœuds de fibres optiques sont d’une certaine manière les veines de la domination. Mais les cœurs qui propulsent ce liquide numérique n’ont pas changé et les vampires qui s’y abreuvent n’ont plus. Le télétravail enrichit toujours les mêmes exploiteurs. L’école à la maison fabrique toujours les mêmes citoyen·nes-employé·es. Le travail dans les entrepôts des sites de vente en ligne est aussi horrible que dans les usines.
Pour alimenter tout ça, il faut des minerais et donc des mines. Il faut des soldats pour contrôler les terres et les livrer aux saccages. Il faut des usines et des centrales pour fournir l’énergie nécessaire au fonctionnement des machines. Il faut des scientifiques et des ingénieurs pour concevoir tout ça, des excavatrices aux réacteurs nucléaires en passant par les chaines de production.
Derrière cet entrelacs de fibres, on retrouve les mêmes ordures qu’hier. Que les câbles se coupent, et voilà que le commerce doit s’arrêter. Qu’une antenne s’enflamme et c’est la voix du pouvoir qui cesse de résonner. Les fiches qui servent aux états à quadriller nos existences, de la carte d’identité au fichage génétique, ne sont plus au fond de tiroir, mais dans des data-centers. Qu’une caméra soit détruite et c’est le techno-flic qui devient borgne.
Ces technologies ne sont pas une forme nouvelle du pouvoir, mais une extension. Les caméras ne diminuent pas le nombre de flics qui rôdent en bagnoles. Les bracelets électroniques ne diminuent pas les prisons, mais transforment chaque domicile en cellule potentielle. Ces technologies viennent compléter l’arsenal du pouvoir. Toute réponse technicienne à un problème issu de cette société ne fait que renforcer la domination. Ainsi les dispositifs techniques pour censurer les sites pédophiles marchent aussi bien contre les sites subversifs. De plus, ils n’ont aucun effet sur la pédocriminalité puisqu’ils ne s’attaquent pas aux causes du problème. On a vu le même mécanisme au sujet de l’ADN qui a été vendu comme un moyen d’arrêter les violeurs et les meurtriers, mais qui sert aujourd’hui à fichier n’importe qui.
Ces dispositifs techniques nous privent de notre capacité à agir en confiant la résolution du problème à d’autres. Et soyons clairs, les scientifiques et les ingénieurs qui développent ces technologies n’ont pas du tout les mêmes intérêts que nous.

Ressources contre la taule

La prison c’est pas un truc abstrait, qui n’existe que pour les autres. Tu as sûrement autour de toi une personne passée par là, 1 personne sur 1000 est actuellement enfermée en taule. Alors voilà quelques ressources pour tenter d’être moins démuni·e face à cela.

Comprendre de quoi on cause :

– détenu·e : personne incarcérée après avoir été jugée

– prévenu·e : personne en attente de son jugement

– AP : administration pénitentiaire

– centre de détention (CD) et centrales : établissement pour peines supérieures à 2 ans

– Maison d’Arrêt des Femmes / Hommes (MAF, MAH) : lieu d’enfermement des prévenu·es ou pour des peines (ou son reliquat) inférieures à 2 ans

– Quartier d’isolement (QI) : Cellules où les détenu·es sont isolé·es par mesure de « précaution » ou de « sécurité », ou à la demande des détenu·es. Ca veut dire pas de contact avec d’autres, pas d’activités.

– Quartier disciplinaire (QD) : Cellules de punition, « mitard », la personne n’a plus le droit à ses affaires perso, pas de promenade (ou si, dans une cage)

– Mandats : argent reçu de l’extérieur, composant le pécule – Cantine : Système de vente ou location aux détenu·es par l’AP (alimentation, produits d’hygiène, papeterie, télé…), bien plus chère que dehors

Aider une personne :

La prison est régie par tout un tas de réglementations sur ce qui entre et sort : les visites, le linge, les livres, les colis, l’argent… Les premiers jours sont souvent difficiles et il peut y avoir pas mal de choses à mettre en place rapidement pour soutenir la personne dedans.

– le guide à l’usage des proches des personnes incarcérées [date de 2013/des infos pas forcément à jour, mais hyper utile quand même] en PDF sur le site : permisdevisite.noblogs.org

– le site ban public : http://prison.eu.org

Pour les questions d’horaires de Vivonne, c’est recensé par le collectif AIRE [tendance charité-catho] : airepoitiersvivonne.fr

Des infos sur ce qui s’y passe : Pour avoir des témoignages, connaître les luttes, faire sortir la parole :

– L’Envolée : site, émission de radio et journal (gratuit dedans pour les prisonier·es et que tu peux aussi retrouver au Local du Placard) : lenvolee.net

– Sur les luttes liées aux CRA, taule pour sans papier·e : abaslescra.noblogs.org

Correspondre / Passer des messages :

La prison c’est fait pour briser les gens et les liens, écrire peut être un premier pas pour enrayer les rouages de l’isolement. Ça peut être à une personne que tu connais ou à un·e inconnu·e, pour ne pas rompre un lien, pour tenter d’en créer un, pour témoigner une solidarité… Tu trouvera tout plein de conseils dans la nouvelle brochure de l’Anarchiste Black Cross :

Guide pour écrire aux personnes détenues [sur : parisabc.noblogs.org ou lasinse.noblogs.org]

Pour faire passer des messages radio à la taule de Vivonne, il y a tous les jeudi soir 19h-20h, l’émission CRI diffusée en direct sur R.C.F. Poitou [attention radio catho ! Protégez vos cerveaux]. Depuis dedans sur la radio 94 .7 / canal 799 de la télé. Tu peux appeler le jeudi soir au 05 49 60 63 63 ou laisser un message écrit : cri.frequencepierrelevee@gmail.com

Le flouse ne coule pas à flot

En prison le moindre « confort », tentative d’amélioration du quotidien coûte cher. Le travail, c’est double peine, tu taf pour tes bourreaux et pour des clopinettes. Les inégalités ne s’arrêtent pas aux portes des taules ! Alors il existe des réseaux de soutien financier pour tenter d’enrayer ça.

– caisses anti-rep locales

– caisse de solidarité aux inculpé.es de la guerre sociale : kaliméro [kalimero@riseup.net]

 

 

Inceste

Cette brochure est une compilation de divers contributions sur le sujet de l’inceste par des personnes qui l’ont subis. Sa lecture n’est pas facile parce que les violences sexuelles sur les enfants restent un tabou mais aussi parce que les faits décrits sont violents et peuvent faire écho à des situations personelles. Comme le disent les auteurices : « – on a envie de se faire du bien à balancer nos vécus, ça permet de prendre du recul sur ce qu’on a vécu. Aussi peut-être pour que nos proches sachent… – on a envie que des gens puissent s’y reconnaître à des endroits et que ça fasse écho pour aider à nommer les situations (ça va plus vite de réaliser des trucs quand d’autres gens posent des mots sur des histoires dans lesquelles on se reconnaît). Ca fait un début de reconnaissance aussi, de capter que des personnes trouvent problématique une situation similaire à la tienne. […] – on veut que les potes qui ont vécu de l’inceste se sentent moins seul.e.s […] « […] quand même, on s’apprête à défoncer le tabou. A trahir les personnes qui sont censées nous avoir aimées et protégées et qu’on doit apprendre à pardonner (et blablabla morales de merde). C’est dur de parler. Et puis parfois théoriquement on sait ce qu’il s’est passé mais émotionnellement on n’en est pas encore à se faire confiance. On banalise, on minimise, on justifie, on tente d’oublier. Et puis parfois, on sait, quelque part au fond de nous, mais notre mémoire nous refuse les souvenirs. C’est dur de parler. Plusieurs personnes nous ont dit qu’elles ne se sentaient pas légitimes à écrire, malgré leurs vécus incestueux. Parce que c’est de l’inceste oui, mais « pas très grave ». Et la peur aussi qu’on a quasi tou.tes à l’idée qu’un membre de notre famille tombe un jour sur cette brochure et s’y reconnaisse. C’est dur de parler. Alors aujourd’hui, nous sommes fières de cette brochure et de réussir à parler. (Trop badasses :) »

A retrouver sur infokiosques.net